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Un petit mot… et tout change !

Prédication du culte de Noël (25 décembre 2018) par le pasteur Christian Baccuet.

Lecture : Luc 2, 1-20

 

En ce jour de Noël, je voudrais partager avec vous un mot. Il est tout petit mais essentiel. Sans lui nous ne serions pas là ce matin. Sans lui Noël serait une fête banale. Sans lui notre foi est vaine.

C’est un mot de quatre lettres qui figure dans le récit de la naissance de Jésus, tel que Luc nous le rapporte. Il y a beaucoup de mots de quatre lettres importants dans ces vingt versets. « Noël » n’y est pas ! Mais les mots « Dieu », « Fils », « paix », « bébé », « nuit », « peur », « ange », « ciel », « aime »… Et puis un autre mot. Plus modeste, presque inaperçu, et pourtant essentiel. Ce mot apparaît trois fois dans notre récit, aux versets 10, 11 et 12 quand l’ange du Seigneur, le messager de Dieu, s’adresse aux bergers. C’est le pronom grec ὑμῖν (umin), qui se traduit en français par « vous ». Pour vous.

 

1. Une bonne nouvelle… pour vous !

« Je vous (ὑμῖν) annonce la bonne nouvelle d’une grande joie », dit d’abord l’ange aux bergers (v. 10).

Une bonne nouvelle est annoncée à la poignée de bergers qui, cette nuit-là, gardent leurs troupeaux. Un « bonne nouvelle », c’est en grec un « évangile », et l’« ange » (comme dans « Ev-ange-ile ») est un porteur de cette nouvelle. Cette bonne nouvelle leur est annoncée personnellement : elle est « pour vous », dit l’ange. Ils sont les premiers de toute l’humanité à l’entendre et par eux, « une grande joie qui sera pour tout le peuple » est destinée à tous. Ces hommes sont symboles de l’ancienne alliance. Ils sont bergers comme l’ont été les patriarches Abraham, Isaac et Jacob, comme l’a été Moïse, comme l’a été le roi David. Le peuple hébreu attend depuis des générations le moment où Dieu va se manifester à lui, le temps du Messie qui va ouvrir la rencontre en vérité avec Dieu. Cette espérance se réalise, c’est aujourd’hui une bonne nouvelle pour les bergers. Les bergers sont aussi, à leur époque, des exclus qui travaillent pendant que les autres dorment, qui côtoient des bêtes dans l’impureté et la misère. Avec eux, la bonne nouvelle est annoncée pour l’ensemble des pauvres, pour toute l’humanité, pour « toute la terre habitée » sur laquelle règne l’empereur César Auguste. Bonne nouvelle pour le peuple de l’alliance et pour tous les peuples de toute la terre. Bonne nouvelle pour les bergers. Une bonne nouvelle « pour vous ».

Une bonne nouvelle… pour nous ! Ce « pour vous » de l’Evangile résonne aujourd’hui pour nous qui entendons à notre tour, à travers ce récit, l’ange nous parler, le message de Dieu nous parvenir. Sans ce « pour vous », Noël ne serait que le récit d’un événement lointain, perdu dans la nuit des temps. Noël ne serait qu’une tradition romantique, un brin naïve ou franchement régressive, un conte entendu chaque année. Noël ne serait qu’une mélodie destinée à nos oreilles, pour nous bercer et nous faire faire de beaux rêves. Quand nous entendons ce « pour vous » de l’Evangile, Noël devient la résonance, dans notre cœur, dans toute notre existence, aujourd’hui, d’une promesse profonde. La réponse à l’espérance qui nous fait désirer une vie heureuse. La réponse à notre misère qui nous fait craindre de ne pouvoir vivre debout.

L’Evangile est bonne nouvelle quand il vit en nous. La foi est une grande joie quand elle vibre en nous !

 

2. Sauveur, Christ, Seigneur… pour vous !

Mais en quoi l’Evangile est-il bonne nouvelle pour nous ? L’ange explique : « Aujourd’hui, dans la ville de David, il vous (ὑμῖν) est né un sauveur, qui est le Christ, le Seigneur » (v. 11). Deuxième apparition du mot « vous ». Et trois termes importants : Sauveur, Christ, Seigneur.

Il vous est né un sauveur…

Pour les bergers de cette première nuit, le mot « sauveur » s’entend comme le nom même de Dieu, ainsi que l’appelle parfois l’ancien testament : celui qui délivre, celui qui protège, celui qui tire des situations dangereuses, celui qui libère. En hébreu, « Dieu sauve » se dit « Ieshoua » (יְשׁוּעָה), qui est aussi le prénom que nous transcrivons habituellement en « Jésus ». Jésus, par sa vie entière va montrer la bonté et la force guérissante de Dieu, la réalisation de son projet de salut. Un sauveur, pour vous.

Pour nous un sauveur ! Il y a tant de choses qui nous pèsent, qui nous enferment, dans lesquelles nous nous perdons. Des souffrances, des peurs, le vide de sens et le manque de perspective, la force de l’argent, du pouvoir, de la haine… Dieu nous sauve de ces puissances, nous délivre, nous guérit, donne sens à nos vies quand sa parole agit en nous. Jésus nous offre le salut, une vie pleine, apaisée, juste, vraie. Pour nous !

Il vous est né un sauveur qui est le Christ…

Pour les bergers, ce mot « Christ » est l’expression de leur espérance. C’est la traduction en grec du mot hébreu « messiah » (מָשִׁיחַ), messie, qui désigne celui qui a été oint, qui a reçu sur la tête quelques gouttes d’huile qui le désignent comme un serviteur de Dieu. Dans l’espérance des hommes et des femmes de la Bible, le messie est le descendant du roi David qui viendra instaurer le règne de Dieu. Il sera le signe de la venue de Dieu lui-même. Cette espérance d’un jour futur se réalise en Jésus, dans l’aujourd’hui des bergers. Le Christ, pour vous.

Pour nous le Christ ! Jésus est cet homme désigné par Dieu comme son fils. Dieu venu à nous. En Christ, Dieu n’est plus un juge lointain mais un Père qui aime et aide à grandir. En Christ, Dieu est celui qui nous aime, chacun de nous personnellement, intimement, inconditionnellement. Il sait ce que nous vivons, traversons, ressentons, espérons. Il peut nous aider à grandir, à nous mettre debout, à trouver sens à notre existence, à devenir adultes dans la vie. Quand nous confessons le Christ pour nous, nous nous mettons en marche dans la confiance. Jésus nous offre l’espérance, une vie relevée, en marche, joyeuse, vivante. Pour nous !

Il est né pour vous un sauveur, le Christ, le Seigneur…

Pour les bergers, le mot « Seigneur » résonne doublement. Dans la foi du premier testament, ce mot désigne Dieu. Là où, dans la Bible, le nom propre de Dieu apparaît (YHWH - יְהֹוָה), les juifs prononcent « Adonaï » (אֲדֹנָי), le Seigneur. Dire que Jésus est le Seigneur, c’est dire qu’il est Dieu ! Ce mot « Seigneur » est aussi le terme que s’attribue l’empereur romain, divinisé, maître du monde et des hommes. Confesser le Christ comme Seigneur, c’est une manière de refuser qu’un homme, fut-il l’empereur, règne sur nos vies et nos consciences. Le Seigneur, pour vous.

Pour nous le Seigneur ! Pour nous, Jésus est Dieu, sa parole fait autorité, sa présence donne force à nos existences. Sa seigneurie nous libère de toutes les puissances de ce monde, qu’elles soient des êtres humains, des idéologies ou des forces sombres comme le pouvoir, l’économie, la peur. Confesser Jésus comme notre Seigneur, c’est pouvoir résister. Jésus nous offre son autorité, une vie debout, forte, responsable, libre. Pour nous !

Noël est bonne nouvelle quand nous comprenons que Jésus est un sauveur, le Christ, le Seigneur pour nous. Pour chacun de nous. Mon sauveur, le Christ pour moi, mon Seigneur.

 

3. Un signe… pour vous !

Et l’ange prononce une troisième fois le mot « vous » : « Et ceci sera pour vous (ὑμῖν) un signe : vous trouverez un nouveau-né emmailloté et couché dans une mangeoire » (v. 12).

Pour vous, un signe. Le signe de la bonne nouvelle, le signe de Dieu, c’est un bébé couché dans une mangeoire. Un signe très important pour ne pas se tromper. Car les mots « sauveur », « Christ » et « Seigneur » ont au temps de Jésus des résonances de pouvoir, de puissance terrestre, de force politique. Les bergers peuvent croire que le temps est venu de prendre les armes pour chasser les romains, de s’emparer du pouvoir pour restaurer un roi juif sur le trône de David, que c’est à leur tour, les écrasés, de se venger en écrasant les autres. Mais le signe est un bébé, dans sa chaleur et sa fragilité, dans son humanité vraie et entière. Un sauveur est annoncé et voici un bébé emmailloté. Le Christ est promis et il se rencontre dans un enfant. Le Seigneur est attendu et c’est une mangeoire qui le porte. Tout est là, la grandeur et l’abaissement, la puissance et la présence, la joie et bientôt la croix, la gloire divine et l’incarnation… Dieu et l’homme se rencontrent ! Un signe, pour vous.

Pour nous un signe ! Jésus lui-même, dans son humanité, est signe de Dieu. La puissance de Dieu pour nous, c’est son humanité, sa proximité, sa sensibilité. C’est le signe qu’en Jésus, Dieu n’a jamais été aussi proche de nous. Que sa force se trouve dans la présence humble et vraie de sa parole. Et que cette parole, même fragile, est force et puissance, capable de lever les bergers à la rencontre de Dieu, le cœur joyeux, s’en retournant dans la louange et le témoignage, ne gardant pas cette nouvelle pour eux. Ce « pour vous » de l’Evangile est la force de Noël, la vérité de cette fête, la joie de notre foi. Pour nous est né le sauveur qui redonne sens à nos existences. Pour nous est né le Christ qui nous dit la venue de Dieu vers nous. Pour nous est né le Seigneur qui nous libère des fausses puissances de cette terre. Pour nous le signe en est un bébé, la présence humble et vraie de Jésus.

 

4. Pour nous, et par nous

Cette présence de Dieu que l’on fête particulièrement à Noël, ce n’est pas la présence d’un jour. C’est une présence pour chacun des jours de notre vie.

Ce petit pronom ὑμῖν, « vous », par lequel tout change, apparaît 91 fois dans l’évangile de Luc ! Tout l’Evangile est pour nous. Tout le Christ est pour nous : ses paroles et ses actes, sa personne et son amour, sa croix et sa résurrection, sa présence et son attente, aujourd’hui et toujours. A la fin de l’évangile de Luc, deux moments importants où ce petit mot, « vous », apparaît.

Au moment de sa passion, Jésus partage le pain et le vin avec ses disciples, au cours du dernier repas qu’il prend avec eux avant d’être arrêté et exécuté, ce repas qui deviendra le premier de la nouvelle alliance pour ceux qui croient en sa résurrection. Jésus dit, au moment où il se met à table : « je vous (ὑμῖν) le dis, je ne mangerai plus ce repas, jusqu’à ce qu’il soit accompli dans le royaume de Dieu » (Luc 22, 16). Puis, au moment où il élève la coupe, il dit : « je vous (ὑμῖν) le dis , je ne boirai plus désormais du fruit de la vigne, jusqu’à ce que le royaume de Dieu soit venu » (Luc 22, 18). Je vous le dis. Je le dis pour vous. Il nous le dit. Il le dit pour nous. Tout à l’heure nous allons prendre ce repas, dans lequel il nous fait signe, signe de sa venue parmi nous, pour nous, signe de sa présence au milieu de nous, avec nous. Les mêmes mots seront proclamés : pour nous.

Et puis, après sa résurrection, Jésus se manifeste à ses disciples, il se donne à reconnaître comme vivant parmi eux, au milieu d’eux. Et il leur dit : « La paix soit avec vous (ὑμῖν) ! » (Luc 24, 36). La paix avec vous. Ma paix pour vous. La paix avec nous. Sa paix pour nous.

Pour nous, en ce jour. Pour nous, pour chaque jour de notre vie ! Pour nous. Alors tout change en nous. Noël n’est plus une histoire folklorique, mais notre histoire, l’histoire de notre vie. Pour nous. Mais pas que pour nous. Pour nous et par nous, le monde peut changer. Pour nous et par nous, l’Evangile est force de paix et de justice, de foi, d’espérance et d’amour pour ce monde. Bonne nouvelle pour tous… Gloire à Dieu dans les lieux très hauts,  et sur la terre paix parmi les hommes qu’il aime.

Joyeux Noël, pour chacun de vous !

Amen.

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