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Et Dieu l'appela son ami

Texte de la prédication du dimanche 27 mars par le Pasteur Christian Baccuet

Et Dieu l’appela son ami

 

Lectures : Hébreux 11, 8-12 et Jacques 2, 23

 

Pentemont, dimanche 27 mars 2022, culte en direct sur France 2 (Présence protestante)

Prédication du pasteur Christian Baccuet

 

 

« Et Dieu l’appela son ami »[1].

Vous savez ce que c’est qu’un « ami » ? Un ami, c’est quelqu’un qui me connaît bien, et qui m’aime quand même. Je ne sais pas si vous avez un tel ami. Abraham, lui, en a eu un, et pas n’importe lequel : Dieu lui-même, nous dit la lettre de Jacques ! Je trouve cela très émouvant, mais cela me pose trois questions.

 

La première : qu’est-ce qu’Abraham a fait pour mériter d’être l’ami de Dieu ?

La lettre de Jacques nous dit que sa foi et ses actes agissaient ensemble[2], qu’il était juste. C’est beau, mais si l’amitié de Dieu est la récompense d’une perfection, cela m’inquiète, car ma foi est souvent chancelante, mes actes ne sont pas toujours à la hauteur de ce que je voudrais être, je suis loin d’être juste.

Abraham, lui, n’est pas n’importe qui.  Il est le père des croyants[3]. Il « obéissait » à Dieu, comme le dit la lettre aux Hébreux[4], avec un verbe qui veut dire « écouter », « être attentif ».

Son histoire, dans le livre de la Genèse[5], nous montre qu’il n’était pourtant pas un super héros.

Abraham n’a pas suivi à la lettre un corps de doctrine ; il a cru comme il pouvait, cahin-caha, découvrant peu à peu un dieu personnel, le Seigneur qui lui parlait et l’appelait à la vie.

Il n’a pas toujours été dans une confiance sans faille pour ce dieu ; il a eu des moments de doute et de découragement, des périodes où il n’y croyait plus.

Il ne suivait pas de cérémonies ou de rites réguliers, il a même reçu la bénédiction d’un prêtre d’une autre religion[6].

Il n’a pas fait que des choses bonnes ; il a plusieurs fois pris des initiatives malheureuses, tout seul, qui ont entraîné des souffrances pour lui ou pour d’autres.

Bref, il n’était pas ce que nous appellerions un croyant parfait, aux convictions solides et à la morale irréprochable.

La Lettre aux Hébreux nous dit qu’il était un être humain qui marchait sur une route inconnue, vivait comme un étranger, habitait sous la tente[7]. Il était fragile et précaire, comme moi.

Si Abraham était juste, c’est parce que Dieu l’avait rendu juste, c’est-à-dire bien ajusté à lui. Si Abraham était l’ami de Dieu, c’est parce que Dieu le connaissait bien et qu’il l’aimait quand même !

Je trouve que c’est une bonne nouvelle pour moi qui marche aussi sur une route humaine semblable à celle d’Abraham. Je peux être moi aussi l’ami de Dieu ! Pas au bout d’une quête de perfection religieuse, morale ou doctrinale, mais parce que Dieu me considère comme son ami !

 

Et là, j’ai une deuxième question : à quoi cela sert-il d’être l’ami de Dieu ? Si c’est pour être enfermé dans une religion de contraintes, d’interdits, de rites, à quoi bon ?

Là encore, l’histoire d’Abraham est forte. L’amitié de Dieu le rend libre, car elle le porte, elle lui donne confiance.

C’est ce mot « confiance » que l’on trouve dans la Bible pour dire la foi d’Abraham. Confiance, c’est un mot de relation. La foi, ce n’est pas d’abord « croire que », c’est « croire en ». « Je crois en toi » est la phrase la plus forte que l’on puisse dire ou recevoir.

« Abraham eut confiance dans le Seigneur ». Cette phrase se trouve dans le chapitre 15 du livre de la Genèse[8], un livre écrit en hébreu. En hébreu, « croire », « avoir la foi », c’est le verbe aman. Il a donné le mot « amen », que nous disons souvent à la fin d’une prière. Il évoque ce qui soutient, ce qui nourrit, ce qui porte. Abraham eut confiance dans le Seigneur, il s’est senti porté par Dieu.

Ce verbe apparaît là pour la première fois dans la Bible, à un moment où c’est Dieu qui a l’initiative : il fait alliance avec lui de manière unilatérale, inconditionnelle, définitive. Abraham va continuer à cheminer dans une vie complexe, mais porté par Dieu qui croit en lui.

Car c’est d’abord Dieu qui croit en lui, qui lui fait confiance.

Je trouve cela extraordinaire : la foi, c’est d’abord celle de Dieu en moi, en vous. « Je crois en toi », nous dit Dieu, je te fais confiance.

Cela est essentiel, dans la vie, de savoir que quelqu’un me fait confiance, et de pouvoir ainsi trouver confiance en moi, établir des relations de confiance avec d’autres.

C’est possible ; beaucoup d’entre nous, dans ce temple, le vivent, en méditant ensemble les paroles de la Bible, en partageant entre nous une vraie fraternité, en nous engageant pour que ce monde soit un peu plus juste, en discutant avec Dieu notre ami – c’est cela, la prière.

Nous le vivons librement et joyeusement, car, au cœur de notre foi, il y a la certitude d’une parole de Jésus pour nous, qu’il a dite à ses disciples : « Je vous appelle amis »[9]. Aujourd’hui, il nous le dit à nous.

Jésus-Christ, c’est Dieu dans la proximité avec des hommes et des femmes tout simples, des disciples fragiles et des personnes en souffrance ou en recherche.

Une proximité jusqu’au bout, jusqu’à la croix, ce moment où Dieu partage nos angoisses et nos souffrances.

Une proximité qui est promesse de vie : au matin de Pâques, le tombeau est vide, le Christ entraîne ses disciples dans la confiance en la présence aimante de Dieu et il les envoie partager cette amitié avec d’autres.

En Jésus-Christ, Dieu nous connaît et il nous aime quand même !

 

Ici j’ai une troisième question. Si je peux moi aussi être l’ami de Dieu, parce que c’est Dieu qui le veut ainsi, si cela donne joie et confiance… Alors pourquoi attendre ?

Cette question, je la dépose ici, pour chacun, chacune de nous.

Pour que nous puissions dire « amen », le mot de la confiance d’Abraham. Pas le mot de la fin mais le mot du départ, le mot du chemin, le mot de l’amitié. Notre mot aujourd’hui. Le mot de celui, de celle qui accepte l’amitié de Dieu.

Amen !

 

[1] Jacques 2, 23.

[2] Jacques 2, 22

[3] Romains 4, 11

[4] Hébreux 11, 8.

[5] Genèse 11, 27 à 25, 11.

[6] Genèse 14, 18-20.

[7] Hébreux 11, 8-10.

[8] Genèse 15, 6.

[9] Jean 15, 15.