Au cœur de nos vies — Église protestante unie de Pentemont-Luxembourg - Communion luthérienne et réformée

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Au cœur de nos vies

Texte de la prédication du dimanche 5 juin 2022, culte de Pentecôte avec un baptême et des confirmations

Lectures : Actes 2, 1-13

 

 

 

Prédication des pasteurs Christian Baccuet (CB) et Andreas Lof (AL).

 

 

CB – Bonjour Andreas !

AL – Salut Christian ! Tu viens d’où, comme cela ?

CB – J’arrive tout juste de Jérusalem !

AL – De Jérusalem ? Mais qu’es-tu allé faire là-bas ?

CB – Eh bien j’avais envie d’aller voir cette ville centrale dans la Bible, ville de David, ville du Temple, ville où Jésus a prêché, où il été crucifié et où il est ressuscité.

AL – Et c’était bien ?

CB – Ah oui, c’était très bien. Mais il y avait un monde fou, la ville débordait de monde, des gens venus de partout pour la fête. Car je suis tombé en pleine fête, figure-toi. C’était le week-end de Pentecôte et c’était la fête… devine de quoi !

AL – De Pentecôte ?

CB – Oui, de Pentecôte. Pentecôte, cela veut dire 50 jours après. 50 jours après la fête de Pâques. Ce jour-là, les Juifs fêtent Shavouoth, fête des moissons. C’est une grande fête, très joyeuse. Ils se rappellent aussi l’alliance avec Noé, et le don de la Torah au Mont Sinaï au temps de Moïse. Un monde fou, et puis quelque chose de très bizarre.

AL – Bizarre ?

CB – Oui. Alors que la ville était pleine de monde en fête, les disciples de Jésus étaient réunis dans une maison, comme ils le font régulièrement. Et tout à coup, un fort bruit, comme un grand coup de vent. Et puis comme des langues de feu qui se sont posées sur eux… Vraiment bizarre…

AL – Oui, bizarre… Figure-toi que j’ai posé la question à un des disciples de Jésus.  Voilà ce qu’il m’a répondu : c’était là des manifestations de l’Esprit de Dieu, qui est venu sur les disciples de Jésus ce jour-là. Cette chose qui les a emportés avec une grande force et qui les avait tous saisis était bien l’Esprit de Dieu, celui que Jésus avait promis à ces disciples.

Et il m’a raconté comment Jésus, au moment de monter vers Dieu leur avait dit cette parole : "Je vous envoie, une force d’en haut, le Saint-Esprit. Il vous permettra d’être mes témoins, d’annoncer la bonne Nouvelle, d’abord à Jérusalem, et ensuite en Judée et partout dans le monde".

Jésus avait donc promis d’envoyer une force d’en haut, l’Esprit Saint. Luc, l’auteur du récit de Pentecôte, nous représente la venue du Saint-Esprit sur les disciples en effet comme des forces venues du ciel : un grand vent d’abord et ensuite des flammes de feu qui descendent d’en haut sur les disciples. Mais je pense que nous ferons bien de les prendre comme des images de ce qui s’est passé dans les cœurs des disciples ce jour-là. C’est cela qu’il nous faut comprendre.

Depuis les jours de Pâques et les rencontres avec leur maître ressuscité, les disciples étaient remplis d’une grande joie ; Dieu avait fait des merveilles, des choses incroyables : Jésus avait été ressuscité, il était vivant, il était bel et bien le Messie attendu, Dieu avait ouvert un temps nouveau, le temps messianique attendu par tous les juifs depuis longtemps. Mais cette joie, ils l’avaient vécue entre eux, à l’intérieur de la communauté des disciples, depuis le jour de Pâques.

Or, rassemblés pour la fête de Pentecôte, la joie que Dieu a mise dans leur cœur dans toutes ces rencontres avec leur maître ressuscité est tellement grande qu’elle va déborder le cercle des disciples. Ils se sentent poussés par l’Esprit de Dieu à en parler aux autres, à ceux dans la rue, les nombreux pèlerins rassemblés pour la fête de Shavouoth. Cette joie des merveilles que Dieu a faites en Jésus, ils vont la partager avec plein d’autres dans les rues de Jérusalem.

Luc, l’auteur des Actes des Apôtres, nous raconte tout cela à sa manière, comme un homme du 1er siècle, à travers ces images, ces symboles du vent et du feu, le miracle de parler d’autres langues.

Le vent est bien une force d’en haut : le vent vient du ciel, circule entre le ciel et la terre. Le vent met en mouvement, il fait bouger. Mais il est invisible. On peut le sentir mais on ne le voit pas. Or, le Saint Esprit de Dieu est aussi une réalité qu’on ne voit pas, quelque chose d’invisible, mais qui est bien une force qui met nos vies en mouvement, quelque chose qu’on peut ressentir comme la joie, l’amour, la confiance, l’espérance, tout ce qui donne un élan à notre vie, qui nous pousse en avant.

Déjà le prophète Elie dans un vieux texte de la Bible avait fait l’expérience de Dieu à travers la brise légère qu’il avait sentie comme une caresse de Dieu, une présence de son Esprit. L’Esprit de Dieu est comme une force douce, la force de sa tendresse pour nous.

Jésus lui-même parlera un jour de l’Esprit Saint en le comparant au vent. Ainsi, dit-il, est l’amour de Dieu. C’est quelque chose qui nous vient d’ailleurs, que Dieu nous donne. Mais cet amour de Dieu vient transformer nos vies et nous mettre en mouvement.  Il nous rapproche des autres, nous pousse vers plus de fraternité entre nous, vers plus de justice et de partage entre les hommes. Il nous rapproche de Dieu parce qu’il fait grandir en nous la foi et la confiance en Dieu. C’est la logique de l’Esprit, c’est la logique de l’amour de Dieu.

Et cela m’amène vers la deuxième image exploitée par Luc pour parler du Saint Esprit : les flammes de feu. Le feu peut détruire bien sûr, des maisons, des forêts. Mais c’est aussi une énergie qui crée de la chaleur, de la lumière. Je pense qu’à travers les flammes de feu au-dessus des têtes des disciples, Luc veut sans doute nous dire que leurs cœurs étaient brûlants de la Bonne Nouvelle, qu’ils étaient rayonnants de la joie de Dieu. Cela se voyait sur leurs visages. Ils étaient tout feu et flamme, on pourrait dire, à cause de ce que Dieu avait fait pour eux et pour les autres, en ressuscitant Jésus.

Luc parle de langues de feu qui se séparent et se posent sur la tête de tous les disciples. Autrement dit, Luc parle d’un enthousiasme, d’une joie qui s’est communiquée de l’un à l’autre, qui saisit chacun des disciples, et qui a ensuite touché le cœur de plein d’autres autour d’eux. Cela s’est propagé dans les rues de Jérusalem, le rumeur autour du rabbi de Nazareth, crucifié par les romains mais ressuscité par Dieu pour être le Messie de tous, comme un feu se propage. Comme une rumeur qui se propage avec une vitesse incroyable.

Et de partout les gens viennent vers les disciples de Jésus, pour les écouter. Les pèlerins étaient venus des quatre coins de l’Empire Romain. En retournant chez eux après les fêtes ils en ont parlé à leurs proches, à leurs amis.  En quelques jours, en quelques semaines, la Bonne Nouvelle s’est propagée aux quatre coins de l’Empire romain, comme un feu se propage. Comme poussé par un vent puissant. Le vent de l’Esprit.

CB – Merci Andreas, je comprends mieux.

AL – Tu sais, Christian, moi aussi j’étais à Jérusalem !

CB – Ah bon, je ne t’y ai pas vu !

AL – Normal, vu le monde qu’il y avait ! Et moi aussi, j’ai vu quelque chose de bizarre. Quand les disciples sont sortis de la maison où ils se réunissaient, et qu’ils ont commencé à témoigner de leur foi, toute le monde les comprenait, chacun entendait dans sa propre langue… Vraiment bizarre !

CB – Ah oui, c’est extraordinaire, cela. Il y a à Jérusalem des personnes de toutes origines. 17 origines sont citées ici, des noms de peuples, des noms de provinces romaines, des noms de régions, des appartenances citoyennes ou religieuses. Une multitude d’origines, qui représentent toute la terre ; ils « viennent de tous les pays du monde ». C’est l’universalité du monde qui est ici signifiée.

Enfin presque, car pour le moment ce sont uniquement des Juifs, ou des convertis (des « prosélytes »). Nous sommes à Jérusalem au cœur d’une fête juive et c’est là, d’abord, que l’Evangile est annoncé.

 

Si on place ces origines sur une carte, elles s’inscrivent dans une sorte de cercle dont le centre est Jérusalem. Bientôt l’Evangile va se répandre au-delà de la ville. Et, un peu plus tard, au-delà du judaïsme, pour tous les êtres humains.

Ce jour-là, l’Evangile sort du cercle des disciples enfermés dans une maison, et se répand parmi la foule, début de l’histoire du témoignage chrétien qui fait que l’Evangile va aller jusqu’aux extrémités de la terre, jusqu’à aujourd’hui, ici dans ce temple, pour nous.

Universalité du message, et cette mention curieuse que chacun l’entend dans sa propre langue.

Comment cela peut-il se faire ? Je vois deux explications.

La première, c’est que les disciples se mettent à parler en d’autres langues que la leur ; ils traduisent le message évangélique dans les différentes langues de l’humanité, pour que l’Evangile rejoigne tout le monde.

C’est à leur suite que des missionnaires vont partir dans le monde entier, apprendre toutes les langues du monde pour y traduire la Bible. A ce jour, la Bible est entièrement traduite en 707 langues, le Nouveau Testament en 1 582 langues, des portions de la Bible en 1 196 langues, et des traductions sont en cours en 2 899 langues[1]. Comme il y a en tout 7 378 langues parlées sur la terre, il y a encore du boulot : avis aux amateurs !

Plus fondamentalement, traduire l’Evangile n’est pas qu’une affaire de langue, c’est aussi une affaire d’interprétation, de partage, de témoignage. Dire à l’autre ce que j’entends de l’Evangile, c’est le traduire pour lui.

Tout à l’heure, les catéchumènes vont partager avec nous, chacun avec ses propres mots, pourquoi il est baptisé ou il confirme, qui est Jésus pour lui, comment un verset biblique lui parle. Ils seront pour nous comme les disciples au jour de Pentecôte !

Et vous, catéchumènes, continuez à traduire la Bible, la foi, l’Evangile, soyez des témoins du Christ avec nous, avec chacun de ceux qui sont dans ce temple aujourd’hui !

Une autre hypothèse, qui n’est pas contradictoire, c’est que les disciples, qui sont originaires de la Galilée, parlent dans leur langue quotidienne ; la foule entend d’ailleurs bien qu’ils sont galiléens, sans doute à leur accent ou à leur dialecte.

Le fait que dans la foule chacun les entend dans sa propre langue nous dit l’autre aspect de la traduction. Il y a la traduction active – dire l’Evangile à quelqu’un – et il y a la traduction passive – recevoir l’Evangile dans sa vie.

Entendre parler des « grandes œuvres de Dieu », c’est davantage qu’une affaire de mots. C’est la résonnance dans son cœur, dans sa vie, dans son existence, des paroles d’Evangile, des gestes qui le disent, de la présence de Dieu. Comme on dit : « ça me parle ! ».

C’est là aussi un appel pour vous, catéchumènes, comme pour chacun de nous : recevoir l’Evangile dans sa vie, le laisser résonner, prendre sens, donner orientation à son existence. Laisser Dieu vous parler. L’écouter, le prier, être disponible à sa présence.

Double mouvement, qui est votre double vocation de chrétiens : entendre l’Evangile dans votre vie, et le traduire pour qu’il touche d’autres dans leur vie.

Poursuivre l’extraordinaire jour de Pentecôte dans l’ordinaire de vos jours !

AL – Merci, Christian, je comprends mieux. Tu sais, j’ai rapporté un souvenir de mon séjour à Jérusalem. Je peux te le montrer ?

CB – Ah bien oui, bien sûr !

AL – Voilà, un cœur… Magnifique, hein ?

CB – Splendide ! Mais pourquoi un cœur ?

AL – Un cœur, parce que l’Esprit saint c’est comme le cœur de Dieu, son amour pour nous, son souffle. Esprit de Pentecôte qui nous dit la présence de Dieu aujourd’hui.

CB – Un cœur, c’est là où le message de l’Evangile vient nous toucher, à la rencontre de nos sentiments et de notre intelligence, dans le quotidien de nos engagements.

AL – Un cœur, c’est le rappel que le cœur de l’Evangile tient dans la prédication que l’apôtre Pierre, ce jour-là, va dire à tous ceux qui sont à Jérusalem. Long discours, dont je te lis le verset conclusif, qui est le verset principal : « Ce Jésus que vous avez cloué sur la croix, c’est lui que Dieu a fait Seigneur et Messie ! ». Voilà le cœur de la foi : Jésus le crucifié – Dieu avec nous dans nos souffrances – est le Christ ressuscité – Dieu qui nous entraîne dans la vie, avec la force d’aimer.

CB – Ce jour-là, à Pentecôte, beaucoup de personnes sont touchées dans leur cœur par cette bonne nouvelle. Près de trois mille personnes demandent le baptême et rejoignent le groupe des disciples. C’est le début de l’Eglise. Le cœur, c’est cette communion qui nous unit à eux et à tous ceux qui nous ont précédés, qui nous unit à tous ceux qui sont réunis en ce jour de fête partout sur la terre, qui nous unit les uns aux autres.

AL – Catéchumènes, aujourd’hui vous devenez membres à part entière de cette Eglise universelle. Bienvenue !

CB – Que l’Esprit saint vous accompagne toute votre vie dans la joie d’appartenir au cœur de Dieu, d’en être les témoins, les traducteurs, de prier avec nous, de vous engager avec nous !

AL et CB – Amen.

 

 

 

 

[1] Septembre 2021. Voir https://www.wycliffe.org.uk/about/our-impact/