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"Suivons le guide !"

Texte de la prédication du dimanche 1er janvier 2023, par Christine Décamp

« Suivons le guide ! »

 

Prédication du dimanche 1er janvier 2023, par Christine Décamp

Lecture biblique : Luc 2, v.8-21 

 

Avant de commencer, il faut que je vous prévienne d’une chose : si vous cherchez quelqu’un de grand, de costaud, de puissant et de noble. En gros, si vous êtes à la recherche du mouton à 5 pattes, je suis désolé de vous annoncer que vous vous êtes trompés de personne… Je ne suis pas le bon candidat, moi je n’ai que 4 pattes !

 

Je me présente, je m’appelle Odilon. Odilon, le mouton. Je fais partie d’une immense famille de moutons et notre troupeau traverse la Palestine depuis des siècles où nous voyageons de pré en pré au gré des saisons.

 

Il faut que je vous raconte ce que je viens de vivre ! C’est exceptionnel ! Vous n’allez pas me croire… Je viens de rencontrer un roi !  

 

C’était par une calme nuit d’hiver, notre troupeau était tranquillement installé dans un pré, au bord d’un ruisseau, quand tout à coup nous avons été réveillés par une étrange apparition : un ange est apparu dans le ciel. Comment vous dire ? Un ange c’est comme un berger mais avec des ailes et une lumière surpuissante tout autour de lui. Comme si le soleil brillait alors qu’on était en pleine nuit. Bergers comme moutons, on a eu une de ces frousses ! On n’avait jamais vu ça auparavant ! Vous imaginez un peu un grand homme illuminé qui vole et qui vous parle en plus.

Il nous a tout de suite rassurés – quand il a vu nos têtes affolées – qu’il ne nous voulait aucun mal, juste nous annoncer une bonne nouvelle : un bébé était né à Bethléem. Mais attention pas n’importe quel bébé, c’est notre Seigneur et Sauveur. Je ne sais pas trop de quoi venait-il nous sauver au juste ?

Je n’ai pas vraiment eu le temps de me poser la question qu’une troupe entière d’anges est apparue et s’est mis à chanter : « Gloire à Dieu dans les cieux très hauts, et paix sur la terre pour ceux qu’il aime ! » (J’adore cette chanson). C’était époustouflant ! Le ciel était illuminé tout au-dessus de nos têtes. Une telle lumière en pleine nuit qu’on aurait dit qu’il était midi.

 

Pourquoi l’ange nous a-t-il choisis pour faire cette grande annonce ? C’est étrange quand on y pense… Nous ne sommes que des bêtes et nous vivons avec nos maîtres dans la plus grande pauvreté. Loin de toute richesse et de toute agitation de la ville, loin de tout et de tous. Pourquoi choisir les personnes les plus pauvres et les plus simples comme nous pour annoncer en avant-première l’arrivée d’un roi ? Je commence à me dire qu’il ne doit pas être tout à fait comme les autres ce roi-là… Pour que ses messagers viennent nous voir nous autres pauvres hères au beau milieu de nos pâturages alors que nous vivons à l’écart du monde et que nous sommes bien souvent les derniers sur la liste. Ce serait fou de se dire que les derniers seraient un jour les premiers !

 

Cette annonce nous a ravis car nous on aime beaucoup les bébés, ces petits êtres mignons et doux comme des agneaux qui dorment paisiblement. Alors ni une ni deux, dès le lendemain, nos maîtres ont décidé de se lever tôt et de prendre la route en direction du village de ce bébé. De mémoire de mouton, je n’avais jamais vu une telle envie pressante parcourir la totalité du troupeau. Les bergers marchaient à vive allure, ils couraient presque, c’est qu’avec nos petites pattes, nous avions peine à les rattraper…

 

C’est vrai qu’on ne s’est pas posé trop de questions. Nous, en tant que moutons, on nous a dit « Yallah ! » Et bien on est partis immédiatement et on a suivi le mouvement sans réfléchir. Sans trop savoir où on allait mais surtout en faisant  confiance à notre berger qui lui connaît par cœur tous les chemins de Judée. Alors suivons le guide !  

 

C’est à ce moment-là que dans la précipitation du voyage, tout à coup j’ai glissé. Ma patte s’est dérobée, elle a achoppé sur une pierre et je me suis retrouvé les quatre pattes en l’air ! Je me suis aussitôt dit le voyage est fini pour moi… On va me laisser là pour éviter de ralentir le troupeau et on viendra me rechercher au retour. C’est le sort réservé aux brebis galeuses… Sauf que ce n’est pas du tout ce qui est arrivé ! Mon maître s’est stoppé dans sa course et il a fait demi-tour jusqu’à moi pour venir me chercher et me porter sur ses épaules jusqu’à la fin du voyage. Je me suis rendu compte à cet instant que j’avais du prix à ses yeux et que je comptais vraiment pour quelqu’un.

 

Ensuite, l’arrivée à Bethléem ne ressemblait pas tout à fait à ce que nous attendions… Nous sommes entrés dans une étable, quelques planches de bois abritaient 3 personnes : Joseph, le père ; Marie, la mère et Jésus, le bébé emmailloté et couché dans une mangeoire. Alors là, si un jour on m’avait dit que je trouverais un bébé humain dans une mangeoire à la place du fourrage, je ne l’aurais jamais cru ! Quelle idée étrange !

 

Du coin de l’œil, discrètement, j’observe Marie. C’est une jeune femme tout ce qu’il y a de plus ordinaire, qui n’a l’air de rien. Et pourtant, elle a un regard profond et intense. Un regard plein d’humilité et de douceur aussi envers ce bébé qui dort devant elle. Elle ne dit rien, se penche en elle-même, au plus profond d’elle-même, comme en prière. Elle reste calme malgré toute l’agitation de notre compagnie venue en masse leur rendre visite. Il faut voir combien on est nombreux et pas toujours disciplinés. Un vrai troupeau ! Et bien malgré tout le ramdam qui envahit soudain l’étable, Marie reste calme et silencieuse. Elle ne prête pas vraiment attention à nous autres moutons. Contrairement à Jésus qui a dû essayer de nous compter vu comme il dort profondément ! Marie a le visage doux et plein de bienveillance et de tendresse à l’égard de ce petit enfant qui vient de naître. Ce fruit de ses entrailles qu’elle bénit et chérit comme ce qui a le plus de valeur à ses yeux, comme le plus important de tous les trésors de ce monde.

 

D’ailleurs en parlant de trésor, je croyais que nous étions venus rendre hommage au nouveau roi. Dans mon imaginaire de mouton, le roi est confortablement installé dans un palais doré et richement décoré. Avec une myriade de serviteurs autour de lui pour remplir ses moindres désirs en lui évitant tout effort. Et une cour composée des personnages les plus nobles de la ville pour l’entourer dignement.

Au lieu de tout cela, nous sommes face à un roi dans le plus simple appareil, sous quelques planches de bois et entouré des êtres les plus simples et les plus pauvres. Le nouveau roi ne fait pas d’entrée triomphale, en grande pompe. Il ne se manifeste pas dans un grand vent, ni dans un éclat de tonnerre ou un grand feu dévorant. Non, le Seigneur apparaît dans un tout petit enfant, dans le bruissement léger d’un souffle ténu.

Mon instinct de mouton me dit que ce petit aura tout d’un grand roi.

 

Un bon roi c’est comme un bon berger « qui vous fait coucher dans de verts pâturages et vous dirige vers des eaux paisibles… »

Ah je me sens naître une âme de poète comme le roi David ! Mais bon, attendez, je m’égare là… Revenons à nos moutons !

Je disais qu’un bon berger c’est avant tout un guide. Celui qui montre le chemin à son troupeau, qui sait rassembler toutes ses brebis et qui les protège de tous les dangers. Le berger est un veilleur car il est plein de patience pour veiller sur chacun d’entre nous. Tenez, par exemple, mon maître ferait tout pour nous sauver !

Une fois, c’est arrivé, que l’un de mes frères à l’âme rebelle s’échappe du troupeau. Il en avait marre d’être traité de mouton de Panurge et surtout il voulait voir si l’herbe était plus verte à côté, alors il a décidé de fuguer. Quand mon maître s’en est aperçu, il nous a tous regroupés, les 99 autres, et il nous a laissés seuls et il est parti à sa recherche. Un mouton seul ne peut pas subsister longtemps, pour se nourrir, pour se repérer dans la vallée et surtout pour échapper aux meutes de loups. Je reconnais que la vie en collectivité ce n’est pas toujours marrant… mais le troupeau, on a beau dire, ça a du bon d’être ensemble. On se tient chaud, on se serre les coudes et de temps en temps on se donne un coup de patte. Ça peut vous paraître bête mais on a le sens du collectif. On se fait confiance les uns les autres et surtout on place toute notre confiance en notre berger car nous avons cette ferme espérance qu’il saura nous mener à bon port, enfin plutôt à bon pré, là où nous pourrons nous reposer et être en sécurité.

 

Une fois que nous sommes arrivés dans l’étable, mon maître m’a descendu de ses épaules et m’a déposé près de la mangeoire. Mais comme j’avais toujours mal à la patte je n’arrivais pas à tenir debout. Il m’a donc légèrement appuyé contre la mangeoire où reposait l’enfant. Et là, miracle, je tenais parfaitement debout ! Et j’ai même pu m’approcher au plus près de ce bébé et lui caresser la main du bout de mon museau.

 

C’est là que j’ai vraiment ressenti que ce petit était un futur grand berger sur lequel de nombreuses brebis égarées pourraient trouver un appui et un maître qui saurait les guider à travers leur nuit. Et comme un bon berger, à coup sûr, « il les fera coucher dans de verts pâturages et les conduira sur des sentiers de justice. »

 

A moins que ce soit lui l’agneau doux et paisible qui saura porter sur son dos toute l’humanité jusqu’à se donner entièrement pour nous sauver tous !

 

Amen.