Quand Jésus loge chez le “pécheur public numéro 1” de Jéricho — Église protestante unie de Pentemont-Luxembourg - Communion luthérienne et réformée

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Quand Jésus loge chez le “pécheur public numéro 1” de Jéricho

Prédication du 3 novembre 2019 par Moïse Mounkoro


Lecture biblique : Luc 19, 1-10

Introduction : 

Pour méditer ensemble sur ce récit de la rencontre entre Zachée et Jésus que nous venons d’entendre, je vous propose de le faire en trois étapes. Dans la première étape je vous proposerai de focaliser notre attention sur le parcours du récit. C’est-à-dire quel est le contexte du récit, comment il commence et comment il finit. Dans la deuxième étape pour aller plus loin dans notre méditation du texte je vous proposerai de surligner quelques noms et termes utilisés dans le récit et voir ensemble si on doit leur accorder de l’importance ou non. Enfin dans la troisième et dernière étape je vous proposerai un temps d'appropriation. C’est-à-dire comment nous pouvons aujour'hui nous approprier ce récit.

Le parcours du récit :

Commençons donc par le parcours du récit. Pour mieux comprendre cette rencontre entre Jésus et Zachée à Jéricho, il faut placer l'événement dans son contexte. Juste avant le texte que nous venons d’entendre, dans Luc chapitre 18 verset 31, il est écrit que Jésus prit ses 12 disciples pour se rendre à Jérusalem où tout ce qui a été écrit à propos de lui par les prophètes dans l’ancien testament va s’accomplir. C’est-à-dire il sera battu, crucifié, et ressuscitera le troisième jour. Donc ici Jésus et ses disciples sont en route vers Jérusalem. Et c’est dans ce cadre qu’il vient traverser Jéricho, une très ancienne ville située sur la rive du Jourdain. Luc nous présente ici Jéricho comme la dernière étape pour Jésus avant son entrée à Jérusalem. 

Alors qu’il traverse les rues de Jéricho une foule immense le suit. Au regard des nombreux miracles qu’il vient d'accomplir Jésus fait l’objet de fascination. Et parmi ceux qui sont fascinés par ce personnage mystérieux, Il y a un certain Zachée. Alors qui est ce Zachée ? Le texte que nous venons de lire est court mais l'évangéliste Luc, l’auteur du récit, arrive quand même à nous donner pas mal de détails sur ce Zachée. La première chose que nous savons de Zachée c’est que c’est un chef de collecteur d’impôts ( donc un juif qui collecte de l’impôt pour les autorités de l’empire romain). 

La deuxième chose que nous savons de lui c’est son statut social : Il était très riche. Et enfin nous avons un détail sur son physique : c’est un homme de petite taille, précise Luc. 

Avec ce physique il est certain qu'au milieu de la foule, Zachée n’a aucune chance de voir Jésus qu’il cherche absolument à voir. Alors Zachée trouve une idée GENIALE.

Il court vite en avant et va monter sur un arbre pour ne pas rater le passage de Jésus. Peut-être à sa place on aurait fait la même chose pour ne pas rater le passage de notre idole. Zachée se met donc en position et attend sur cet arbre. Jésus en arrivant sous l’arbre, lève spontanément les yeux et dit à Zachée cette phrase surprenante : “Descends vite, il faut que je loge chez toi aujourd'hui”. Dans notre temps moderne on dira que visiblement Jésus n’a pensé à réserver son Airbnb ou sa nuit d’hôtel à Jéricho et cherche donc une solution d’urgence de logement auprès de Zachée.

Néanmoins Zachée accepte avec joie cette injonction de Jésus d’être reçu chez lui. Ce qu’il faut relever ici c’est que au tout début du texte c’est Zachée qui cherchait à voir Jésus et tout d’un coup on a un changement d’initiateur, maintenant c’est Jésus qui prend l’initiative, qui prend les choses en main et veut loger absolument chez Zachée. Et pas demain ou après demain. Mais maintenant.

Zachée on l’a dit, sa profession c’est : chef de collecteur d’impôts. Le fait que Jésus décide d’aller loger chez lui ne passe pas du tout auprès de la foule. Ce n’est pas quelqu’un d’une bonne réputation, personne ne le trouve sympa. Pour les juifs c’est un collabo, un agent des romains qui extorque de l’argent aux petites gens. Donc la foule ne comprend pas pourquoi Jésus a voulu  loger chez ce “pécheur en puissance”, alors que la ville est pleine de personnes “saintes” et plus dignes de l’accueillir. Mais Jésus ne se laisse pas déstabiliser par la foule, il ne renonce pas à aller loger chez Zachée, il n’a pas envie de se conformer, de faire comme tout le monde c’est-à-dire loger chez un chef religieux qui aurait une bonne image.

Dans la suite du récit, on voit que Zachée est bouleversé par la décision de Jésus de venir loger chez lui. Conséquence : Alors que Jésus ne lui demande rien il se met à proclamer ceci : “Maître je vais donner la moitiée de mes biens aux pauvres et si j’ai pris trop d’argent à quelqu’un je vais lui rendre quatre fois autant.” Ici on a clairement quelque chose de l’ordre de la conversion. Après ces mots de Zachée Jésus prend à son tour la parole et proclame : “Aujourd’hui, le salut est entré dans cette maison parce que tu es aussi toi Zaché, un descendant d’Abraham. Car moi le fils de l’homme est venu chercher et sauver ceux qui étaient perdus comme toi.”

Voilà pour le parcours du récit : au tout début du texte c’est Zachée qui cherche à voir Jésus et vers la fin du récit c’est finalement Jésus qui cherche à se rendre chez lui.

Les accents du récit :

Dans la deuxième étape de notre médiation sur ce texte, je voudrais maintenant qu’on prête notre attention à quelques éléments précis pour se poser la question de savoir s’ils sont là par hasard ou pas, s’ils sont importants ou pas, ou encore si ce sont des métaphores qui portent un message. 

Par exemple, faut-il accorder de l’importance au nom Zachée qui signifie “pure, innocent, juste” ? Est-ce que Luc veut nous dire par là que Dieu sauve seulement les gens qui ont un coeur pur, les innocents ? Je ne suis pas pas sûr que ce soir le message principal ici. 

Mais est-ce qu’il faut accorder de l’importance à la petite taille de Zachée ? Est-ce que ce serait une symbolique pour dire que les petits de ce monde seront les plus grands dans le Royaume des Cieux ? Ce serait beau mais je ne suis pas non plus sûr que ce soit le seul message que Luc a voulu faire passer. Autre question : faut-il voir la course de Zachée pour aller se mettre devant comme une métaphore qui voudrait dire que seuls ceux qui courent le plus vite comme par exemple Usain Bolt ou encore Christophe Lemaitre sont ceux qui seront sauvés ? 

Ou encore faut-il voir la montée de Zachée  sur l’arbre comme une métaphore qui voudrait dire que seuls les gens qui savent prendre de la hauteur seront sauvés ?

On pourrait continuer ce petit jeu de relever des métaphores pour tenter de comprendre ce texte. Mais finalement je me dis : revenons à la source, revenons à Jésus et voir ce qu’il nous dit. Et c’est là que je vous invite à entrer avec moi dans la troisième étape, le temps de l’appropriation. Qu’est-ce que nous pouvons nous tirer aujourd’hui de ce texte, de cette rencontre entre Zachée et Jésus à Jéricho ?

Le temps de l’appropriation : 

Tout d’abord, ce que je trouve frappant ici c’est comment Zachée a été littéralement transformé par le regard bienveillant de Jésus. Il cherchait à voir qui était Jésus. Il l’a vu, et cette rencontre bouleverse sa vie à tel point qu’il décide de distribuer une partie de ses biens aux pauvres. Mais ce n’est pas parce qu’il donne aux pauvres qu’il est sauvé à mon avis. Il est sauvé surtout grâce aux paroles que Jésus lui a adressés : toi aussi tu es un fils d’Abraham. 

Pour les juifs, Zachée n’était plus des leurs parce qu’il travaille avec les colons romains. Il était considéré comme un collabo qui vole de l’argent aux petites gens et là Jésus vient par cette parole (toi aussi tu es un fils d’Abraham) le réintégrer dans la grande famille de la lignée d’Abraham. Personne dans la foule ne pouvait imaginer cette conversion de Zachée. Lui qui était habitué aux regards de condamnation, de mépris, lui qui porte l’étiquette de collabo, de “pécheur en puissance”, de “pécheur public numéro 1” dans la ville, vient tout à coup d’être libéré par un regard de compassion venant de Jésus.

Peut-être il nous arrive aussi de nous retrouver dans la place de Zachée, condamnés, jugés, catégorisés, classés avec une certaine étiquette sur le front. Aujourd’hui le salut est entré dans cette maison parce que tu es, toi aussi, un descendant d’Abraham. Car  le fils de l’homme est venu chercher et sauver ceux qui étaient perdus”.

Je suis convaincu que cette deuxième chance que Jésus a donné hier à Zachée il est prêt aujourd'hui à donner à nous aussi la même chance. La chance de se relever et repartir de nouveau sous un regard de compassion. 

Il faut que je loge chez toi aujourd'hui. C’est un aujourd'hui qui proclame le salut, tout de suite et maintenant. Et au passage il faut noter que ce terme “aujourd'hui” est très souvent utilisé dans la Bible.

Citons deux exemples : Premier exemple, quand Jésus est sur la croix il y a avec lui deux brigands, l’un à sa gauche et l’autre à sa droite. A celui qui est à sa droite il dit ceci : Aujourd'hui même tu seras avec moi au Royaume des Cieux. Deuxième exemple : Quand l’ange annonce la naissance de Jésus aux bergers dans Luc 2, Il dit aux bergers : Aujourd'hui dans la ville de David un sauveur vous est né. Cet aujourd'hui souvent employé dans les textes bibliques est  un aujourd'hui heureux qui proclame le salut et sur chacun de nous, maintenant et tout de suite.

 

Pour revenir à l’histoire de Zachée, nous pourrions nous poser cette question. Y a t-il dans notre entourage, dans notre famille, des Zachées ? Des gens à qui on a collé depuis des années une étiquette ? Des gens à qui on a dit qu’ils n’étaient pas dignes, des gens à qui on a dit : “c’est foutu pour toi” ? Des gens à qui on a dit qu’ils ne sont pas dignes de mettre le pied dans une église ? Des gens dont on pense qu’ils ne seront jamais sensibles à l’Evangile ? 

L’histoire de Zachée nous montre que nous avons souvent tout faux car c’est le Christ lui-même qui se charge du salut, mais il a besoin de nous pour être à l’écoute de ces Zachée, pour répondre à leur questions.

Toujours dans l’évangile de Luc, le chapitre 18, verset 26. La foule pose cette question à Jésus : Mais qui peut être sauvé ? Jésus répond à la foule avec ce verset devenu populaire : “Ce qui est impossible aux hommes est possible à Dieu”. 

“Ce qui est impossible aux hommes est possible à Dieu”. C’est une invitation à proclamer le salut sur nous-même, à prier pour ceux qui dans notre société sont exclus et considérés comme des Zachées.

A nous qui avons souvent des doutes, Jésus nous dit maintenant et tout de suite cette phrase : Toi aussi, tu es un fils, une fille d’Abraham. Que cela sooit ainsi. Amen !