Le goût du silence — Église protestante unie de Pentemont-Luxembourg - Communion luthérienne et réformée

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Le goût du silence

L'édito de la LPL n°52 (Lettre de Pentemont-Luxembourg), par le pasteur Christian Baccuet (décembre 2018 - février 2019)

Je viens de lire un merveilleux petit livre, petit par la taille mais grand par l’immensité de sens qu’il propose. Il s’agit d’une méditation intime, très belle, très simple, un poème sans ponctuation, tout en suspension. Il s’appelle « Le plein silence »[1]. Il a été écrit par Marion Muller-Colard, écrivaine et théologienne protestante. Elle y partage son expérience d’une retraite de huit jours dans un monastère, dans le silence et le jeûne, le dépouillement de soi-même, le combat avec Dieu qu’elle rencontre comme s’il était un maître en arts martiaux. Elle y dépose l’agitation des jours, la prétention au perfectionnisme, le désir de tout maîtriser, pour se laisser convertir à la grâce d’une vie qui n’a qu’à recevoir.

Au début de cette expérience, écrit-elle,

                  Il se peut

                  je le conçois

                  qu’à ne plus parler

                  on entende enfin

                  ce qui parle

                  au plus profond de soi

A la fin, elle n’a qu’un chose à dire à Dieu :

                  Je sais que tu es celui

                  qui sait que je suis

 

Merveilleuse confession de foi ! En lisant et relisant ce livre, j’ai pensé à Marie qui, la nuit de Noël, après avoir reçu la visite des bergers, « retenait toutes ces choses et y réfléchissait » (Luc 2, 19). Marie, dans le silence de son expérience, l’enfant nouveau-né couché près d’elle, se laissait envahir par la douceur des paroles des messagers de Dieu : bonne nouvelle, grande joie, naissance du sauveur, gloire à Dieu et paix sur la terre !

Dans le temps de Noël, s’accueille la bonne nouvelle d’un Dieu qui se fait tout proche de nous dans la faiblesse d’un nouveau-né, dans la fragilité d’une vie offerte, dans la simplicité d’un amour partagé. Paradoxalement, c’est aussi un temps de course – course après le temps et courses dans les magasins qui se rajoutent à nos existences emportées dans le tourbillon du quotidien. Nos jours sont agités, notre monde est bousculé, le manque de sens nous pousse à nous exciter dans une sorte de frénésie sans fin, comme pour repousser loin de nous l’angoisse de vivre. Il nous est souvent difficile de nous arrêter pour reposer nos vies, les re-poser dans l’essentiel. Comment profiter vraiment de la dimension spirituelle de Noël ?

Et si nous faisions plus souvent silence ? Pas un silence qui rime avec absence, vide qui isole, meurtrit, désespère, mais son contraire : un silence qui rime avec présence, qui est disponibilité à soi-même, à l’autre, à l’essentiel. Un silence pour écouter Dieu…

Les temps qui sont proposés dans notre paroisse (jeudis de l’avent, culte « Noël avec les enfants », veillée de Noël, culte de Noël) ne se dérouleront bien sûr pas sans paroles, chants et joie, mais ils seront espace d’une pause offerte pour que nos vies se posent. Comme un temps suspendu, un temps de grâce, un temps où, dans le creux de nos jours, Dieu se présente à nous en Jésus-Christ. Puissions-nous goûter à cette présence délicieuse !

 Pasteur Christian Baccuet

 

[1] Marion Muller-Colard, Le plein silence, Genève, Labor et Fides, 2018. L’aquarelle qui illustre cet éditorial est de Francine Carrillo, elle figure sur la couverture du livre.