Roule tes tombeaux ! — Église protestante unie de Pentemont-Luxembourg - Communion luthérienne et réformée

Aller au contenu. | Aller à la navigation

Outils personnels

Église protestante unie de Pentemont-Luxembourg
Menu

Roule tes tombeaux !

Prédication du dimanche 31 mars 2024 - Dimanche de Pâques, par la pasteure Sophie Ollier

 

Roule tes tombeaux !!

Prédication du dimanche 31 mars 2024 - Dimanche de Pâques, par la Pasteure Sophie Ollier

 

Lecture biblique : Jean 20, versets 1 à 18

 

Pâques, la résurrection, un tombeau vide ! De l’incompréhension, des larmes, une perte de repères, la découverte de quelque chose d’exceptionnel et un appel à aller plus loin que là où nous sommes aujourd’hui ! Un appel à voir de la vie là où il semble ne plus en avoir ! Un texte d’une grande actualité à tellement de niveaux, personnels, sociétaux, mondiaux.

Une phrase attire mon attention aujourd’hui : On a enlevé mon Seigneur, et je ne sais pas où on l’a mis ! Quand on regarde notre monde aujourd’hui, on peut avoir la même réflexion : où est Dieu ? On ne sait pas où on l’a mis ! De plus en plus on voit des personnes en désespérance, isolées, perdues de tout repères, et la question peut se poser : où est Dieu ? Le désarroi de Marie-Madeleine dans ce texte de la résurrection de Jésus rejoint cette question : je ne sais pas où est mon Seigneur !

Tout est la question de la présence de Dieu, où se trouve Dieu ? Où se trouve Dieu actuellement ?

C’est ce dont nous parle ce texte dès le début ! Au milieu de la mort il s’agit de trouver la présence de Dieu. Oui, si nous sommes devant un texte de la résurrection, ce texte nous parle de la mort. Si Marie-Madeleine vient au tombeau ce matin-là, c’est parce qu’il y a eu la mort. Si les disciples viennent, sont troublés, si Marie-Madeleine se questionne, c’est parce qu’au milieu de la douleur se rajoute la supposée absence de Dieu.

Alors oui, effectivement si nous parlons de la résurrection nous devons parler de la mort. Celle qu’on ne peut éviter car elle arrive, elle se rend présente dans nos vies à tous ! Elle est inévitable ! Comme on dit, elle fait partie de la vie ! Et en même temps, il y a bien des morts qui nous semblent tellement injustes, des morts qui ne peuvent pas faire partie de notre vie !

Si nous ne faisons pas attention, lorsqu’on parle de la Résurrection et avec ce texte on pourrait glisser vers une négation de la mort, un refus de la mort ! Mais ne tombons pas dans ce piège aujourd’hui !

Ne l’évitons pas, ce contexte est le nôtre aujourd’hui ! Tout autour de nous, en continue, nous la voyons, dans les journaux, aux infos, sur les réseaux sociaux, dans nos vies personnelles. Des images en continue, des chiffres, des débats, des obsèques. Que ce soient les guerres, les attentats, les maladies, la misère, les départs soudains… La mort fait partie de notre quotidien ! Mais malheureusement elle devient banale. Et puis, il y a la mort physique et les morts intérieures, les dépressions, les burn-out qui se multiplient, l’augmentation du stress, du mal-être, de l’anxiété, chez nous, chez les trentenaires, chez nos jeunes !! Ces morts-là on en parle mais on trouve des excuses ou on fait culpabiliser pour ne pas les considérer pleinement !

Nous en voyons tellement, on nous annonce des morts et hop on passe à la prochaine. Comme si au final on en arrivait à nier la mort. Habitués à voir des images de morts et de guerres qu’on en vient à ne pas trouver ça si horrible au final celui ou celle qui meurt au coin de notre rue. Paradoxalement, on s’enferme dans une culture de la mort, plutôt que de s’ouvrir à autre chose !

Ha, joyeuses Pâques au fait !

Je suis dure je sais, mais nous ne pouvons pas nier cette ambiance aujourd’hui qui nous entoure !

Justement c’est important, l’Evangile ne nie pas la mort ! L’Evangile pose la mort comme un fait incontestable ! La mort a été ! Jésus est mort, il a été enseveli, il a été mis au tombeau ! La mort est posée de manière radicale ! Alors, s’il y a mort, qu’il y a-t-il après ? Et pour nous aujourd’hui ?

Et là on arrive à la question du texte, la question de Pâques, et peut-être la question de nos vies de croyant ! Qu’est-ce que la résurrection ? Que veut dire cette résurrection du Christ ? Mais surtout, encore aujourd’hui, nous qui ne sommes pas Marie-Madeleine, qui n’avons pas assisté à ce moment d’étonnement, que veut dire la résurrection pour nous ?

Pour Marie-Madeleine et ensuite les disciples c’est une résurrection physique, Jésus s’est littéralement relevé d’entre les morts, il est revenu à la vie ! Lui-même l’a dit plus tôt : Je suis la résurrection et la vie ! Un des 7 Je Suis de Jésus qui nous a accompagné tout au long du Carême !

Qu’est-ce que la résurrection ? Un homme : Jésus de Nazareth ! Et qu’est-ce que cet homme sinon La Parole ? Et oui, dans l’Evangile de Jean même c’est très clair dès le début : Au commencement était la Parole, La Parole était la vraie Lumière, celle qui éclaire tous les humains, elle venait dans le monde ! La Parole est devenue chair, elle a fait sa demeure parmi nous !

Voilà donc ce qui est porteur de la résurrection, celle du texte mais pour nous aussi aujourd’hui : Jésus Christ, la Parole de Dieu ! Une Parole qui résonne pour faire sortir chaque homme, chaque femme, des tombeaux dans lesquels nous sommes ! Ce Jésus, cette Parole qui est !

Cette Parole qui est pain, nourriture d’espérance pour faire entendre au monde ce que veut dire Vivre.

Cette Parole qui est Lumière pour nous laisser illuminer par Dieu pour que jaillissent la justice.

Cette Parole qui est porte, pour une vie abondante qui nous porte à l’extérieure.

Cette Parole qui est bon berger, qui est présence, guide, accompagnement pour un monde plus vrai, plus humain, plus lumineux.

Cette Parole qui est résurrection et vie, qui fait surgir la grâce et la miséricorde au milieux de nos misères.

Cette Parole qui est chemin, vérité et vie, qui nous libère et nous envoie.

Cette Parole qui est cep, pour que nous, nous puissions porter les fruits de la Bonne Nouvelle dans ce monde !

Quelle puissance !!! Quelle vie !! Oui, parce qu’au milieu de toute cette mort dont nous parlions, c’est la vie qui surgit, qui appelle, qui envoie, qui nous fait sortir de nos tombeaux !

Jésus même fait sortir Marie-Madeleine de là où elle se trouve : Cesse de t’accrocher à moi, mais va vers… Il l’envoie ! Il ne la laisse pas où elle est, dans les pleurs ou l’étonnement, il ne la laisse pas figée sur elle-même mais il l’envoie !

Il l’appelle à devenir actrice de sa propre résurrection ! Jésus provoque un déplacement ! Voilà ce qu’est la résurrection dans ce texte, et pour nous, pour toi : Jésus ouvre dès maintenant vers un dehors !

Vous vous doutez bien qu’il ne s’agit pas seulement d'une sortie physique ! Nous sommes dans une affirmation qu’ici, maintenant, un dehors est possible, un dehors de nos tombeaux !

Oui, vas vers !!!

Va vers ! Sors de tes culpabilités qui te rongent pour découvrir un chemin nouveau !

Va vers ! Sors de ces morts qui te rongent pour t’ouvrir à ce qui redonne la vie !

Va vers ! Sors de ces pensées qui t’enferment sur toi-même pour découvrir des richesses qui te combleront !

Va vers ! Sors de tes échecs pour en faire des victoires !

Va vers ! Sors de ce qui obscurcit tes jours pour découvrir une Lumière rayonnante !

Va vers ! Sors vers tes frères et tes sœurs, ton prochain pour y trouver toute la beauté de Dieu dans sa diversité !

Va vers ! Sors des tombeaux qui bloquent la vie !

Voilà donc ce qu’est la résurrection ! Va vers ! Dehors ! Sors de la nuit ! Ne t’attache pas à la nuit ! C’est ainsi que triomphe le dynamisme créateur de Dieu, c’est ainsi que Dieu vainc la mort, triomphe du mal, des souffrances, des injustices, il ne vide pas du mal mais il fait triompher le bon, par la résurrection. C’est ainsi que nous pourrions dire : « je ne crois pas à la résurrection parce que le tombeau est vide, mais je crois à la résurrection pour que les tombeaux soient vides ».

Oui, je crois que nous avons réellement et pleinement besoin de ce texte aujourd’hui et qu’il rejoint nos vies, qu’il parle de nous !

Il parle de nous parce que tout le ministère du Christ, de la Parole incarnée de Dieu, est tournée vers nous, du début à la fin, de son baptême à sa résurrection et bien après encore ! Tout est entièrement tourné vers nous !

A bien y regarder, si nous prenons les Evangiles, que ce soient les Paroles de Jésus ou ses actes, les miracles, tout est entièrement tourné vers l’humain et le fait de lui redonner sa place d'humain, face à lui-même, face aux autres et face à Dieu ! En réalité, tous les passages des Evangiles nous disent une chose : Il est bon que tu existes ! Je vous invite dans les temps qui viennent à rouvrir votre Bible et à y lire les Evangiles avec ça : Il est bon que tu existes !

L’appel à l’amour du prochain comme soi-même, c’est-à-dire considérer que mon existence n’a pas de prix et que celle de mon prochain non plus.

L’appel à prier pour ses ennemis et les bénir, c’est-à-dire entendre que mon prochain, tout ennemi soit-il, est tout autant important aux yeux de Dieu que moi.

La guérison de l’aveugle, du paralytique, des lépreux, et autres, Jésus les a regardés, les a considérés, leur a redonné une place d'humain dans ce monde par le simple fait de les avoir reconnus !

Et ici, dans notre texte, lorsque Jésus appelle Marie-Madeleine par son nom, il la replace dans son humanité vivante qui n’est pas tournée vers la mort. Il lui demande d’aller vers, il l’invite à sortir de son propre tombeau, il lui dit qu’il est bon qu’elle existe dans ce monde ! Il lui redonne sa place d'humaine en l’appelant à la vie ! C’est pas dingue ça ?! Il nous invite à rouler la pierre de nos tombeaux qui nous empêche d’avancer ! Une fois encore, il nous a montré l’exemple !!!

Et c’est ce que nous avons à entendre nous aussi aujourd’hui, au fin fond de nos paradoxes, de nos morts, de nos enfermements, qu’ils soient physiques certes mais surtout intérieurs, parce que nous en avons tous. Dieu, par Jésus Christ pose ce regard sur chacun et chacune de nous : il est tellement bon que tu existes, roule-la cette pierre, je suis là pour t’aider ! Et cette phrase est source de résurrection pour nous !! Et pour celles et ceux à qui nous en témoignerons, va vers !

Que serait la résurrection de nos êtres sans cette Parole-là ? Un coca sans bulle, une musique sans notes, une pizza sans pâte, une raclette sans fromage, une mer sans poissons, un ciel sans oiseaux, un vélo sans roues, un journal paroissial sans articles, une chorale sans choristes, un pré sans herbe (je peux continuer encore longtemps), une montagne sans sommet, une plage de galet sans cailloux, un éclat de rire sans joie, une poignée de main sans rencontre, une aide sans empathie, une conversation sans mots, une relation sans sentiments… Oui, nous avons besoin de cette Parole pour ressusciter aujourd’hui !

J’avais commencé cette prédication en nous demandant : où se trouve Dieu ?

Ce texte de résurrection nous le dit : Dieu se trouve du côté de la vie ! Il est dans et pour la vie ! La nôtre, à chacun et chacune, mais aussi celle de ce monde !

Désormais, le Christ a changé la donne. Il n’y a plus d’alternative mais une seule possibilité devant nous : voici, je place devant toi la vie pour que tu vives. Vas-y, va vers elle ! Ce n’est plus « la mort ou la vie » dans une sorte d’alternative !

Il n’y a désormais devant nous qu’un pôle : la VIE et rien que la vie.

Je ne crois pas à la résurrection parce que le tombeau est vide, mais je crois à la résurrection pour que les tombeaux soient vides.

Par cette croix de bois, par cette résurrection, Dieu nous a dit et nous dit encore, à chacun et chacune de nous : Vas-y, roule la pierre de tes tombeaux, je suis là pour t’aider, va vers la vie, Choisis la Vie !

Amen.

Sophie Ollier