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Endosser la justice

Prédication du dimanche 1er octobre 2023, par la pasteure Sophie Ollier

 

Endosser la justice ! 

par la pasteure Sophie Ollier

 

Culte du dimanche 1er octobre 2023 - Culte des moissons

Lectures bibliques :

  • Ephésien 2, versets 11 à 22
  • Amos 5, verset 24

 

Nous voilà réunis aujourd’hui pour parler de Justice, avec ce verset dans Amos « Que l’équité coule comme de l’eau et la justice comme un torrent intarissable » (Amos 5, 24), et ce texte dans Ephésiens ! Dans l’épître aux Ephésiens on nous dit que la séparation et l’hostilité n’existent plus en Christ, que nous sommes concitoyens des saints. Et puis avec Amos nous sommes dans un livre qui tourne autour de l’opulence de certains qui frappe les personnes dans la précarité.

Et tout cela, la mise à mal des murs qui nous séparent et la prise de conscience des inégalités sont le sens même de la justice et de notre rapport au monde ! Mais une question m’est venue : pourquoi ? Comment ? Qu’est-ce qui fait que cette question de la justice est quelque chose d’essentiel ? Et puis, il y a une différence entre, être assis sur nos bancs et se dire « ha oui oui c’est bien, c’est beau », et le pratiquer ! On sait qu’au quotidien ce n’est pas si simple que ça !

Pour poursuivre cette prédication, j’aimerais vous présenter une œuvre d’art ! Attention aux amateurs d’art et de haute couture… SORTIR LE TEE SHIRT ! Magnifique, je sais !

Je vous propose de voir comment nous pouvons répondre au « pourquoi et comment » de la justice avec ce tee-shirt, en lien avec le passage que nous avons lu dans l’épître aux Ephésiens !

Prenons une question simple : quel est le plus grand obstacle à la justice et l’équité ?

« J’étais là avant » !

Tous les jours nous l’entendons et nous le vivions. J’étais là avant. Que ce soit par rapport à la nationalité ou la légitimité d'une religion sur une autre, ou bien même dans la queue du supermarché.

« Nous étions là avant ». Tous ces réfugiés de guerre ou climatiques que nous voyons arriver ou s’exiler dans d'autres pays et nous nous posons la question « Que faire ? » Et en même temps nous avons peur. Notre tranquillité, notre paix, sont menacées, nous avons peur de voir changer nos repères, notre chez nous. Alors pour préserver nos traditions et nos repères nous dressons des murs. « Nous étions là avant ».

Et c’est là que Paul veut en venir dans sa lettre. L’épitre proclame « Mais Ça, c’était avant ». En Christ NOUS passons d'un « vous » lointain que l’on rejette à un « nous » qui inclut toutes les nations pour les unir. Paul nous rappelle que même dans ces distinctions judéo-chrétiennes de circoncis et incirconcis, ce n’est que le jugement et la classification humaine. Il nous dit que nous toutes et tous qui sommes là, et celles et ceux dehors, chacun avec nos distinctions de foi, de pratiques, de vie, nous ne sommes plus séparés.

Ou en sommes-nous avec notre teeshirt ? Ha oui, ce sont donc ces pièces de tissus, chacune représentant un groupe dans la société, plus ou moins gros, plus ou moins voyant, avec des frontières plus ou moins définies. Mais toutes rattachées au même teeshirt. Chacune des communautés chrétiennes pourrait correspondre à un bout de tissu. Chaque être humain pourrait correspondre à un bout de tissu ! Chaque groupe de la société, chaque pays, chaque nationalité… enfin vous comprenez ! Et pourquoi pas, même, y intégrer tout le vivant avec lequel Dieu alliance avec Noé ?! Une pièce de végétal, une pièce animale…

Si je mets le vivant et l’humain ensemble c’est parce que nous ne le voyons que trop bien à quel point tout est lié. Le respect de la terre, du végétal, de l’animal est une question de justice. Détruire une partie impliquera une injustice pour quelqu’un ou pour du vivant.

Les murs existent, que nous le voulions ou non, mais alors comment ou pourquoi deviendrions nous être proche ? En quoi pouvons-nous être unis ?

Paul le dit clairement, nous passons d'un peuple dans le monde à un peuple en Jésus Christ. Nous étions loin, maintenant nous sommes proches. Nous devenons concitoyens du monde, co-ressucités, sauvés par la grâce, ensemble.

Attention, être unis et proches ne veut pas dire tous lisses. Dans la lettre aux Ephésiens, la diversité n’est jamais remise en question. Et même plus que ça, au chapitre 3 il est dit que la sagesse de Dieu qui réunit les humains en un même corps est diversifié, littéralement en grec « polymulticolore ».

Si on réfléchit bien à nos vies, chacun de nous met des pierres quelque part, soyons honnêtes avec nous-mêmes ! Ca nous arrive à tous de rejeter, critiquer, juger, pointer du doigt, ignorer, détruire d’une manière ou d’une autre un bout de terre, un habitat pour du vivant ! Tout cela ce sont des petites pierres ! Et qu’on le veuille ou non, on créé des murs ! Tous nous avons créé des murs dans nos vies ! Mais comment pouvons-nous réellement rentrer en lien avec quelqu’un, avec ce monde, offrir et vivre cette Bonne Nouvelle de justice et de vie, alors qu’on parle à travers des murs ?

Prendre conscience des murs que nous érigeons nous permet d’enlever les pierres au fur et à mesure pour aller jusqu’à la réconciliation. Et la réconciliation ne signifie pas seulement réunir ou se mettre d'accord, mais en grec le mot réconciliation signifie « rendre autre, transformer, échanger ». Créer quelque chose de nouveau.

L’amour du Christ nous presse, oui il nous presse à la réconciliation. Bien sûr, en tout premier cette réconciliation concerne notre relation à Dieu et les gouffres que nous mettons entre lui et nous, en s’éloignant dans notre vie ou dans notre cœur, par de nombreuses pierres : la communion blessée, l’intolérance, l’orgueil, les divisions, l’isolement, l’abus de pouvoir, la volonté de dominer, la course à l’opulence, la surexploitation, etc…  Mais cette réconciliation nous concerne également tous, entre nous, et c’est ce que nous dit Paul.

Nous sommes aujourd’hui dans un monde pollué par les conflits et les enjeux de pouvoir, par les guerres et les tueries du vivant. Nous sommes dans un monde où se sont nos doigts sur un clavier qui communiquent, un monde où être vu par l’autre devient une honte et où regarder l’autre nous met mal à l’aise. Un monde où si moi j’ai mais que l’autre n’a rien on s’en fiche. Un monde où nous détournons les yeux de ce qui est un problème. Nous sommes dans un monde qui justifie l’exclusion au nom d’une tradition, qui justifie la violence au nom de la liberté, qui justifie le racisme au nom de la paix, ou que sais-je ?!

Toutes ces pierres qui construisent des murs quand elles pourraient construire des ponts pour que les fleuves de justice se déversent ! Alors, je vous voir venir ! Pourquoi vous dire tout ça ? Quel rapport avec le tee-shirt ? Merci de poser la question oui ! 

Parce qu’il y a quelque chose qu’on oublie facilement et qui pourtant est un fait ! Alors oui, nous avons des groupes distincts rattachés à la société. Mais comment sont-ils rattachés ? Tous par le même fil de la même couleur ! Leur humanité et le vivant ! Le fait qu’ils soient chacun une pierre à l’édifice de l’habitation de Dieu, et une pierre à l’édifice de ce monde. On peut avoir tous les discours politiques, raciaux, identitaires qu’on veut, cette vérité-là est un fait ! Notre humanité est la même pour tous ! Le Christ lui-même est venu pour la multitude, pour tous, car tous nous sommes enfants de Dieu, sans distinction à ses yeux ! A tous il nous dit « Il est bon que tu existes » ! Et cette simple vérité est trop souvent oubliée ! 

L’épître nous invite à nous diriger vers cette vérité-là, cet amour-là, qui ne s’accommode ni n’accepte l’exclusion et les murs ! Alors si nous ne l’acceptons pas, agissons ! 

Mais comment ?

Nous avons tous les jours l’opportunité de détruire des murs qui nous bloquent, et si ce n’est détruire c’est au moins enlever une brique, et c’est toujours ça de gagné. Si nous avons l’opportunité d'agir ne serait-ce qu’un tout petit peu, ne reculons pas, ça peut passer par des gestes simples qui sont les signes d'un amour plus vaste qu’on ne le pense. Des gestes qui ont un effet domino.

Vous savez, cette idée selon laquelle si je souris à quelqu’un dans la rue, ça le fera sourire, ce qui fera sourire une autre personne et ainsi de suite. Et c’est là que j’en reviens, encore, au teeshirt. Chaque ruban représente un acte, un geste simple qui nous lie directement à Dieu. Le temps, l’hospitalité, le sourire, le partage, l’accueil, le respect, etc… Il n’y a pas de clefs magiques qui rassemblent, mais des pas à faire. C’est par cet effet domino, qu’ensemble, nous construisons des ponts de justice et de vie, indépendamment de nos appartenances. Et le Christ nous l’a redit : ce que vous faites à un plus petit, à un autre, alors vous le faites à moi aussi ! Si nous nous réclamons du Christ, nous ne pouvons pas ignorer cela !

Ces mots paraissent simples, mais dans la vie de tous les jours ça ne l’est pas tant que ça. Sourire à un inconnu, accueillir la nouveauté, l’étranger, partager ses biens ou encore mieux son esprit et son temps, comprendre la personne en face de nous, lui parler, l’écouter vraiment, prendre le temps de reconsidérer nos modes de vies, nos fonctionnement, notre confort… Nous sommes invités à réfléchir à comment ces gestes prennent places dans notre vie de tous les jours, comment les inclure. Il est souvent difficile pour nous de pratiquer la justice pour ceux qui sont à l’autre bout du monde, mais dans notre quotidien, c’est à portée de gestes !

Alors, revenons donc à notre question initiale : pourquoi et comment pratiquer la justice ?

Résumons notre tee-shirt.

Ce teeshirt n’est pas facile à porter et à assumer, il est cependant une réalité, la société dans laquelle nous évoluons. Plein de groupes distincts, plus ou moins définis, plus ou moins bien rattachés à la société avec des limites parfois floues. Les fils qui tiennent ces groupes à la société sont l’humanité et le vivant qui émanent de nous et de ce monde, nous sommes tous liés à ce monde, rattachés chacun à notre manière. Et cette simple raison répond au pourquoi de la justice !

Il y a au-dessus un cœur, Dieu, qui est en mouvement et qui bouge. Chaque ruban représente la manière par laquelle nous pouvons être rattachés à Dieu. Chaque ruban comporte un geste : amitié, temps, compréhension, partage, accueil, sourire, échange, humanité, amour, respect, écoute…

Donc chaque groupe est rattaché à la société, à ce monde par sa condition de vivant. Lorsque vous tirez Dieu de chaque situation, par les rubans de l’accueil, de l’échange, du partage, etc… tous les groupes se réunissent et se rassemblent. Et encore mieux, un groupe pourra aider un autre, le pousser, l’emmener avec lui, et nous serons également portés par d'autres. Et par Dieu nous sommes invités à nous déplacer. Chaque groupe garde ses distinctions, mais ils se mêlent, en Dieu.

Les pierres d’un mur restent statiques ! Les barrages retiennent les eaux ! Les pierres vivantes que nous sommes forment des ponts en faisant un pas vers l’autre, en nous mettant en mouvement ! Et les ponts, plus que les barrages, laissent s’écouler des fleuves d’équité et de justice !

Alors à nous maintenant, à chacun et chacune de nous de porter ce tee-shirt de vie, d’espérance, ce tee-shirt qui met à mal les murs de ce monde, ce tee-shirt qui créé des ponts ! Parce que, croyez-moi, chacun et chacune de nous compte pour que ce tee-shirt prenne vie et soit signe de justice !

Alors j’aimerais vous proposer quelque chose. Vous avez reçu un petit tee-shirt en arrivant nan ?! Et au milieu de ce temple se trouve un fleuve ! C’est chacun et ensemble que nous pouvons faire grandir ces fleuves de justice et d’équité pour le vivant, par la multiplication de nos actes dans ce monde, par la multiplication des tee-shirt de justice ! Alors je vous invite à écrire sur ce bout de papier « une action que je pourrais faire pour rendre ce monde plus juste » et ensuite venir le déposer sur le fleuve !

PAUSE

Voici donc le fleuve de justice qui peut se déverser dans ce monde par nos gestes, nos êtres, pour le vivant ! A la fin du culte n’hésitez pas à récupérer un des tee-shirt de justice, pas le vôtre, qui vous portera et que vous porterez dans ce monde pour que se déversent ces fleuves !

Et si vous acceptez dès aujourd’hui de porter ce tee-shirt, d’endosser la justice, alors, à n’en pas douter, vous porterez le Christ dans ce monde qui offre à tous et à chacun du vivant, humain, animal, végétal, cette Parole de Vie : Il est bon que tu existes !!

Partant de là, nous saurons ce que veut dire « faire le bien et apprendre la justice ».

Amen.

Sophie Ollier