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A Taaaaaaaable !!

Prédication du dimanche 31 août, par la pasteure Sophie Ollier

 

A Taaaaaaaable !!

Prédication du dimanche 31 août, par la pasteure Sophie Ollier

 

Lecture biblique : Luc 14, versets 1 à 14 

 

 

Voilà le retour des vacances, et la rentrée imminente ! Et quand j’ai regardé le texte du jour j’ai découvert un texte biblique qui se passe autour d’une table ! Quelle joie, aussi bien pour la joie d’un repas où se passe la vie et pour la joie de retrouver ce Jésus qui nous déplace. Et oui, une table, une fête, des invités, de quoi passer un moment convivial tous ensemble !

La convivialité au centre de notre vie, une convivialité qui nous questionne, c’est certain, mais quand même une rentrée sous le signe du partage, de l’autre, du lien à notre vie ! Vraiment, j’aime cette rentrée ! Tout un menu qui nous est donné par Jésus pour aborder cette nouvelle année !

Alors, bien sûr, Jésus ne va pas nous offrir une expérience culinaire dans ces textes, mais avec lui de toute façon il y en a toujours pour le ventre, pour la tête, pour le cœur et pour nos vies !

Mais quand même, comme pour un vrai repas, il y a entrée, plat dessert ! Une guérison, une parabole, une exhortation ! On commence à être habitué, avoir Jésus à sa table ce n’est pas de tout repos, d’autant plus ici ! Peut-être que c’est pour ça qu’on prie ou qu’on chante de moins en moins avant le repas… peut-être avons-nous peur d’inviter Jésus à notre table qui sait ?!

Et oui, inviter Jésus à sa table, ça met du piment dans l’assiette ! Les pharisiens et les invités ne pourront pas dire le contraire !

Bon, allons-y, plongeons dans ce texte pour comprendre quelle recette nous donne Jésus ce matin, nous sommes invités à table, alors allons-y !  

D’abord l’entrée !

Et pour une fois, c’est Jésus qui ouvre le bal avec une question : « est-il permis ou non d’opérer une guérison pendant le sabbat ? » lorsqu’un homme atteint d’hydropisie se présente à lui. L’hydropisie est une accumulation d’eau dans le corps. Littéralement, un homme qui se noie dans son propre corps. Bon, normalement on ne guérit pas le jour du sabbat, et il le sait, mais il le fait quand même pour ensuite poser la question aux pharisiens : lequel de vous, si son fils ou son bœuf tombe dans un puits, ne le retirera pas aussitôt, le jour du sabbat ?

Avant même que les pharisiens ne lui posent la question, Jésus prend le contrepied pour leur rappeler, une fois encore, que la loi est là pour guider et faire grandir, non pour faire mourir ! Que la loi n’est pas là pour asservir mais pour relever. Que la religion n’est pas là pour asséner mais pour ouvrir ! Le sabbat est là pour le repos et la prière mais ne sépare pas l’humain du monde dans lequel il vit. Quelle différence il y a-t-il entre sauver son fils qui se noie dans un puits et un homme qui se noie dans son corps ? Aucune.

Ainsi, en entrée, Jésus nous parle d’honnêteté ! L’honnêteté : ne jugeons pas trop hâtivement quand nous-même nous ne sommes pas dans la situation, et surtout quand l’on sait profondément qu’on agirait de la même manière si cela nous arrivait… Nous sommes dans une société de jugement perpétuel, nous pointons du doigt tellement facilement ceux qui sont à l’autre bout de la planète ou juste dans un autre pays, ou même au coin de la rue. Le SDF n’a qu’à trouver un travail. Le migrant n’a qu’à retourner dans son pays et se battre. La femme violée n’avait qu’à pas porter de jupe. La femme battue n'a qu’à partir de chez elle. La personne en dépression n’a qu’à décider d’aller mieux. Des phrases qu’on peut entendre dans le monde d’aujourd’hui.

Soyons honnête dans nos relations aux autres et à ce qui nous entoure, dans notre relation à celles et ceux qui vivent des choses différentes de nous mais qui, pour autant, rejoignent profondément notre humanité. La critique est aisée, l’honnêteté l’est moins. 

C’est donc l’entrée dans un menu qui va se poursuivre : l’honnêteté en soi même.

Passons au plat maintenant, parce que Jésus ne s’arrête pas là ! Il regarde autour de lui et enchaine ! Il voit les invités se chamailler les meilleures places au repas ! Alors il y va ! « A quoi cela te sert-il de te mettre en avant de la sorte, ce n’est pas toi qui décides de la place que tu occupes dans la vie de quelqu’un ! » En gros c’est un peu ce qu’il leur dit ! Jésus aborde cette question de la place que nous prenons face à l’autre, suis-je dans une posture de mise en avant ou suis-je dans une posture d’humilité ? Quand avec les pharisiens il touche à la question de l’honnêteté de soi à soi, là il touche à la question de l’humilité de soi face à l’autre.

Une fois que nous sommes déjà honnêtes avec nous même, nous serons en honnêteté et en humilité face à celles et ceux qui sont en face de nous. Et attention, on ne parle pas ici d’une espèce de fausse humilité du style « Je suis humble et j’en suis fière ». Non. Il n’est pas question d’aller se mettre à la dernière place en se disant qu’on viendra me chercher pour me mettre devant ! Il s’agit d’être face à l’autre et face à Dieu dans une posture qui n’est pas une posture de pouvoir ou de mise en avant.

Dans la Bible lorsqu’on aborde la question de l’humilité c’est associé à la question de la modestie mais aussi de se savoir faillible, de se savoir imparfait, de se reconnaître comme étant petit et pourtant profondément et inconditionnellement aimé de Dieu ! Tout un paradoxe en nous ! Parce que lorsqu’on se sent petit, faible, avec des failles, ce sont les moments où nous nous sentons les moins dignes de Dieu. Et pourtant, il semblerait, avec ce que nous dit Jésus dans ce texte, que c’est pile le moment où nous prenons conscience de cet amour inconditionnel de Dieu pour nous. Il y a au moins une personne avec qui nous pouvons tout lâcher, à qui nous pouvons dire nos failles, nos zones d’ombres, nos faiblesses, ces lieux dans nos vies où nous savons que nous nous mentons, lui peut recevoir tout cela. Ce n’est pas incroyable ça ? Savoir que dans tout ce que tu es, dans la lumière et dans l’ombre, dans l’amour et dans l’indifférence, dans la bonté et dans la colère, tu es aimé et accompagné, et lui te donnes cette opportunité-là, de le sentir et le dire pleinement !!

Tu es déjà invité à la fête, tu es déjà aimé de Dieu profondément, pourquoi te gonfler d’orgueil ? Cela est directement relié au fait d’être en pleine honnêteté avec soi-même !

Oui, comme je l’ai dit plus tôt, inviter Jésus à sa table ça met de l’ambiance !

On a souvent du mal avec l’humilité dans notre société, surtout que c’est rarement vu comme une vertu malheureusement ! Aujourd’hui, celui qui est humble aura tendance à se faire marcher dessus. On met en avant l’orgueil, le fait de mieux réussir que les autres, d’avoir plus d’argent, d’avoir fait plus d’études, d’avoir un travail qui a « de la valeur » aux yeux de la société, d’avoir des enfants qui réussissent, une belle maison… Et on se gonfle d’orgueil face à ceux qui ne « réussissent » pas selon ces termes-là ! On se gonfle d’orgueil face aux personnes qui seraient « moins éduquées » que nous selon ces termes-là ! Ce qui ne veut absolument rien dire, disons-le !

Quoique, j’ai quand même l’impression qu’on arrive à la fin de ce dictat de l’orgueil, les générations qui arrivent n’en peuvent plus et comprennent combien cet orgueil est en train de détruire ce monde. Je l’espère profondément en tout cas ! Et en même temps un gouffre se creuse, entre ceux qui insistent là-dessus, sur la suprématie de… de quoi ? En fait je ne sais pas, la suprématie de la connaissance, de l’argent, du pouvoir, du rang social… Mais qu’est-ce que cela veut dire ? L’intelligence humaine ne dépend pas d’un diplôme, la compassion ne dépend pas de l’argent en banque, l’entraide ne dépend pas d’un rang social et la conscience du monde ne dépend pas d’un pouvoir ! On le voit bien !

Voici donc le plat, après l’entrée de l’honnêteté, Jésus nous sert le plat de l’humilité !

Alors, que nous propose-t-il en dessert ?

Pour ce dernier temps de repas, Jésus s’adresse directement à celui qui l’a invité : pourquoi invites-tu amis et famille, voisins riches, et pas l’infirme, l’estropié, le mendiant ? Qu’attends-tu en retour ?

Jésus aborde là la question de la générosité et du don ! Donner à celui qui peut te rendre n’est pas du tout pareil que de donner à celui qui ne peut pas te rendre. Bien sûr on peut dire qu’on invite des amis à manger sans rien attendre en retour, et c’est vrai, mais on est dans une société qui nous dit que cela est un dû, et la situation du donnant-donnant s’installe. Alors que le don pur et dur, la générosité simple, cela ne suppose rien en retour ! On pourrait faire une prédication entière sur ce sujet bien sûr, mais nous pouvons nous poser cette question pour nos vies, en toute honnêteté et humilité : quelle dose de gratuité est-ce que je mets dans ma relation aux autres ?

Et dans notre Eglise, qu’offrons-nous de gratuit ? On se dit offrir à celles et ceux qui passent, tout en souhaitant que nous ayons plus de monde au culte par exemple ! Et bien sûr qu’on souhaite que d’autres découvrent cette espérance qui nous met en route, et qu’ils vivent cette rencontre que nous avons eu avec Dieu, mais à quel point nous accueillons sans ce prisme ? Que vivons-nous en Eglise qui ne soit pas sujet à résultat ? Que proposons-nous qui ne soit pas « en vue de » mais juste pour proposer de la vie ? Et pourquoi ce « sans but » est vu comme un « temps inutile » ? Et finalement, quelle générosité avons-nous ? Est-ce une générosité qui demande un rendu ou est-ce une générosité qui se contente de vivre ?

La générosité : dans une société du donnant donnant nous faisons très très rarement quelque chose gratuitement ! Oui je veux bien te rendre un service, mais tiens en échange si tu pouvais… phrase tellement commune ! Il est question de la posture que nous occupons avec l’autre, dans quelle situation le mettons-nous ? Quand on parle de générosité il ne s’agit pas de la quantité qu’on donne, Jésus n’en parle pas, il s’agit d’une manière d’être avec l’autre où on ne le met pas dans une posture à devoir rendre quelque chose !

Donner sans rien attendre en retour, donner de son argent certes, mais donner aussi de son temps, de ses talents, de ses compétences, de sa compassion, de son écoute ! Être là avec l’autre en toute simplicité ! Dans une société où tout se paye, tout se rend, tout se compte et se monnaie, peut-être qu’on a vraiment besoin d’entendre cet appel à la générosité et à la gratuité que nous lance Jésus ! Si au moins nos relations à l’autre, à la nature et à Dieu aussi, pouvait être uniquement sur une base de générosité gratuite, alors notre monde se permettrait peut-être un peu plus d’humilité !

Voici donc le dessert : la générosité gratuite !

Oui, comme on peut le voir, ce sont de petites questions pour nos vies que nous pose Jésus aujourd’hui : quelle relation d’honnêteté ai-je de moi à moi ? quelle relation d’humilité ai-je face à l’autre ? quelle relation de générosité ai-je avec les autres ?

Oui, ces 3 passages ensemble nous parle de notre manière d’être soi, d’être à l’autre et d’être avec l’autre !  

Voilà donc la recette parfaite de l’être ensemble, individuellement et en Eglise ! Une entrée d’honnêteté, un plat d’humilité et un dessert d’une générosité gratuite !

En cette nouvelle année qui s’ouvre devant nous, face aux difficultés que nous allons rencontrer dans les mois à venir face aux divers conflits qui éclatent dans le monde, face à la montée des prix de partout, face à la précarité grandissante, face aux défis de nos paroisse, et face à ceux qui essayent de survivre, je nous invite à garder ces enseignements du Christ pour nos vies, pour nos vies à chacun, et pour notre vie d’Eglise aussi !

Allez, A table maintenant !!

Amen.