Les quatre grandes dates de l’histoire biblique — Église protestante unie de Pentemont-Luxembourg - Communion luthérienne et réformée

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Les quatre grandes dates de l’histoire biblique

Prédication du dimanche 22 octobre 2017, par le pasteur Christian Baccuet

Au cours du culte du matin : baptême de Gabriel D.-B. (6 semaines) et d’Apolline A. (23 mois).

 

Lectures :

  • Ezéchiel 36, 24-28
  • Marc 12, 28-31
  • Actes 2, 38-39

 

Dans chacune de nos vies, il y a quelques dates qui comptent plus que d’autres. Notre naissance, une rencontre amoureuse, l’arrivée d’un enfant, parfois la mort de quelqu’un, une dispute ou un événement d’actualité. Nos vies ne se résument pas à ces quelques dates, bien sûr, mais elles sont souvent jalonnées par elles, comme autant de repères sur notre chemin. A tel point que, bien souvent, nous en faisons mémoire ou nous les célébrons.

Chacun de nous a ses propres dates, car chacun de nous est singulier. Ce matin, nous sommes divers en âges, en parcours de vie, en engagements, en visions de la vie. Certains d’entre nous sont protestants, d’autres catholiques, d’autres juifs, ou même bouddhistes ; il y a sans doute parmi nous des personnes qui croient en Dieu, d’autres qui cherchent ou se questionnent, d’autres qui ne se sentent pas concernés par la dimension religieuse.

Chacun de nous est là avec son existence, ses joies et ses épreuves, ses souvenirs et ses espérances, ses questions et ses convictions.

Au risque de vous décevoir (mais personnellement je trouve cela plutôt rassurant !), nous ne sommes pas les premiers à vivre ainsi. Dans le livre qui nous rassemble aujourd’hui se trouvent des générations d’hommes et de femmes qui ont cheminé comme nous dans des existences parfois chaotiques, parfois sereines, tantôt douloureuses, tantôt confiantes, souvent tout cela à la fois.

Leur histoire est la nôtre et le témoignage de ce qu’ils ont vécu est éclairant pour nos vies. C’est pourquoi, au centre de notre culte comme au centre de notre existence croyante, se tient la Bible ouverte, lue et méditée.

Aujourd’hui, je vous invite à un voyage à grandes enjambées dans ce livre, à travers les quatre dates principales de l’histoire de ce peuple en marche dans la foi, l’amour et l’espérance. Quatre dates qui jalonnent leur chemin, quatre dates qui peuvent jalonner notre propre vie.

 

1 – L’exode

La première date n’est pas très précise. Selon les historiens, elle peut se situer entre le XVIe et le XIIe siècle avant notre ère, la majeure partie d’entre eux la fixant au XIIIe siècle. Il s’agit de l’événement fondateur pour les hébreux : la sortie d’Egypte.

Depuis plusieurs générations, les hébreux étaient esclaves en Egypte, et voici que Dieu missionne Moïse pour les libérer. Vous connaissez les grandes lignes des événements qui s’enchaînent : le refus du Pharaon de laisser partir ses esclaves, le départ de ceux-ci dans la nuit, le passage de la Mer Rouge, le don de la Loi sur le Mont Sinaï, les quarante années d’errance et d’épreuves dans le désert avant l’entrée en terre promise.

Cette histoire épique est fondamentalement l’histoire d’une libération. L’acte qui fonde le judaïsme est celui d’un Dieu qui libère les siens des chaînes qui l’aliènent. Dieu se révèle comme celui qui entend les souffrances des siens et qui les mène vers la liberté : d’esclaves, c’est-à-dire d’hommes et de femmes considérés comme des objets, il fait des êtres libres.

Seulement, la liberté n’est pas facile à vivre, chacun est toujours pris entre la nostalgie et l’éparpillement individualiste. Aussi, Dieu ne fait-il pas que libérer des personnes, il constitue en même temps un peuple ; Dieu des opprimés, il devient Dieu d’un peuple d’hommes et de femmes debout. Pour cela, il donne une Loi – les dix commandements mais aussi toutes les autres paroles qui indiquent comment vivre –, il fait alliance avec eux. Sa Parole donne un cadre à leur liberté, les axes qui permettent à celle-ci de s’inscrire dans la durée et la solidarité. Sa Parole est structurante.

Jésus, dans le passage de Marc que nous avons entendu, la synthétise en deux mouvements : aimer le Seigneur Dieu de tout son être, et aimer son prochain comme soi-même. Articuler cette double relation verticale et horizontale, la prière et l’engagement, c’est être à la fois libre et responsable.

Chaque année depuis ce jour de la sortie d’Egypte, les juifs commémorent cet événement lors de la fête de la Pâque – Pessah (פָּ֫סַח) qui veut dire « passer ». C’est un écho au Dieu qui est « passé » au-dessus des maisons des esclaves hébreux pour les protéger, puis aux fuyards qui sont « passés » au travers des eaux de la mer rouge qui, en s’ouvrant, ont permis aux hébreux en fuite de traverser pour entrer dans une région nouvelle, et qui, en se refermant, ont empêché les égyptiens de mettre fin à cette libération.

L’exode, c’est la révélation du Dieu sauveur ! Le passage à travers l’eau en est signe.

 

2 – L’exil

La deuxième date est plus précise : l’année 587 avant notre ère. Cette année-là, une catastrophe s’abat sur Jérusalem et ses habitants.

Après la sortie d’Egypte, la traversée du désert et l’entrée en terre promise, le peuple hébreu s’était développé, comme tous les peuples, à travers des moments de prospérité et des temps de conflits : période des Juges, puis des Rois (Saul, David, Salomon), puis schisme et guerres fratricides entre deux royaume rivaux, Israël avec Samarie comme capitale au nord, Juda avec Jérusalem comme capitale au sud, pression des grandes puissances régionales : Assyrie, Egypte, Babylone. Au VIIIe siècle, le Royaume du Nord est tombé sous les coups des assyriens.

En 587, les babyloniens s’emparent de Jérusalem, détruisent la ville, brûlent le Temple et l’arche de l’alliance qui contenait les tables de la Loi, et emmènent les hébreux en exil à Babylone.

C’est une catastrophe pour les israélites, catastrophe humaine bien sûr, comme l’est toute situation d’exil forcé, mais aussi catastrophe spirituelle : le Dieu des hébreux, celui-là même qui avait accompagné jusque-là son peuple, l’aurait-il abandonné ? Ou serait-il moins fort que les dieux des babyloniens ? Cet événement, tout autant que l’exode, va être fondateur pour les juifs.

D’une part, ils vont se poser fortement la question des raisons de leur malheur : qu’est-ce qui, dans notre manière de vivre, a pu nous affaiblir à ce point que nous avons tout perdu ? Question lancinante de la souffrance, de la culpabilité, de la rédemption aussi. Car dans cette détresse, ils vont accéder à une autre dimension de la foi, celle d’un Dieu qui n’abandonne pas les siens même quand tout semble sans issue, celle d’un Dieu qui suscite l’espérance, relève les têtes, restaure la confiance, régénère les cœurs.

Le texte d’Ezéchiel se situe dans ce contexte, quand le prophète porte la Parole de Dieu aux exilés : vous reviendrez chez vous ! Non pas comme un retour en arrière, mais comme un nouveau départ : une eau pure, un cœur nouveau, un souffle nouveau ! Formidable espérance, qui va se concrétiser dans le retour des exilés, une cinquantaine d’années plus tard, mais aussi dans l’espérance messianique, l’attente du temps où la présence de Dieu sera pleinement vécue.

D’autre part, ils vont réaliser que leur Dieu, celui dont ils sont le peuple dans cette relation forte d’une alliance scellée lors de l’exode, est aussi le Dieu de l’univers, le seul Dieu, le Dieu qui règne sur la terre et dans les cieux, depuis toujours et pour toujours. Leur Dieu est le Dieu de tous les hommes, partout sur la terre. Formidable extension de leur compréhension de la foi, dans une ouverture vers l’universel.

Le Dieu de l’exil est toujours le Dieu sauveur ; il est aussi le Dieu créateur ! Et l’eau en est le signe.

 

3 – Jésus-Christ

Pour la troisième date de l’histoire biblique, nous faisons un bond de plus de 800 ans, pour arriver en l’an 30 de notre ère, plus précisément du 7 au 9 avril. En pleine fête de la Pâque, Jésus, juif partageant la mémoire de son peuple et porté par l’espérance de celui-ci, Messie attendu qui ouvre le temps de la présence de Dieu, est crucifié et enterré le vendredi ; le dimanche sa tombe est vide et il se manifeste ressuscité à ses disciples.

En ces trois jours ceux qui croient en lui voient leur vie bouleversée.

Ils l’ont suivi pendant environ trois ans sur les routes de Galilée et de Judée, ont bu à ses paroles et à ses gestes, partagé le vécu libérateur de sa présence sans limites, principalement orientée vers ceux qui ont besoin d’être aimés, soutenus, regardés, parce qu’isolés, mal-aimés, exclus. Ils ont perçu que cette libération crée de l’hostilité car elle renverse les repères, bouscule les habitudes, dérange les puissants. Ils ont assisté – de loin, car ils sont faibles comme nous – à l’arrestation puis à l’exécution de Jésus sur la croix, supplice épouvantable et humiliant. Ils ont cru avoir tout perdu.

Et puis leur entendement est bousculé par la résurrection, cette aube où une libération nouvelle est née, celle de la mort, cette aube où une création nouvelle a été inaugurée, celle du règne de Dieu.

Jésus-Christ devient le point focal où tout change radicalement ; il est l’incarnation de Dieu, ce Dieu qui se donne totalement pour rejoindre chaque être humain là où il en est de sa vie, ce Dieu qui se donne entièrement pour ouvrir le temps du pardon et d’une vie renouvelée, ce Dieu qui donne son Esprit saint – la présence de Dieu, son souffle, sa respiration –, ce Dieu qui se donne pour tous, dans le temps (« vous et vos enfants ») et dans l’espace (« et pour tous ceux qui sont au loin »). C’est ce que nous dit Pierre, dans l’extrait du discours de Pentecôte dans le livre des Actes.

En Jésus-Christ, Dieu s’incarne. Le Dieu sauveur se fait homme, le Dieu créateur nous rejoint dans notre humanité, le Père se manifeste dans une relation de proximité avec la vie de chaque personne sur cette terre. Pour les chrétiens, en lui s’accomplit la promesse de Dieu, sa présence. L’exode et l’exil prennent toute leur dimension, universelle et pour chaque être humain.

Le baptême le signifie, ce baptême qui est plongée dans l’eau : passage à travers l’eau qui entraîne sur les chemins de la liberté comme au temps de l’exode et du passage de la Mer Rouge ; passage à travers l’eau qui dit la vie nouvelle, le cœur nouveau, le souffle nouveau comme au temps de l’exil et du prophète Ezéchiel ; passage à travers la mort pour jaillir dans la vie à la suite du Christ mort et ressuscité ; passage dans la foi, l’espérance et l’amour partagés, conversion radicale aux temps nouveaux, celui de la présence de Dieu, tous les jours.

Le Dieu de Jésus-Christ est ce Dieu sauveur et ce Dieu créateur qui s’est fait l’un de nous pour nous relever et nous entraîner avec lui dans une vie chaque jour renouvelée ! Et l’eau du baptême en est le signe.

 

 

4 – Aujourd’hui

L’exode, l’exil, l’Evangile, trois dates essentielles de l’histoire biblique, de l’histoire du peuple de Dieu, de l’histoire des hommes et des femmes qui ont rencontré Dieu et marché à sa suite. Trois dates qui s’articulent les unes aux autres, et dont l’éloignement mutuel dans le temps dit qu’il faut du temps pour les comprendre et pour les vivre.

Il y a une quatrième date essentielle dans cette histoire. C’est le dimanche 22 octobre 2017… aujourd’hui !

Cette histoire n’est qu’une histoire si elle reste dans l’histoire, dans le passé, dans la mémoire. Elle prend tout son sens si elle est vécue, ici et maintenant, par nous. C’est-à-dire si elle prend sens en nous, dans notre cœur, dans notre existence, dans notre quotidien.

C’est cela que signifie le baptême d’Apolline et de Gabriel, aujourd’hui. Cette histoire est désormais la leur, ils sont appelés à participer à cette aventure, ils sont désormais des nôtres.

Comme Dieu, au temps de l’exode, a libéré les esclaves pour en faire un peuple libre, il leur fait place dans son alliance, dans la communauté de ceux qui vivent de cette libération, dans le peuple de Dieu et ses multiples expressions, dans ce que nous nommons l’Eglise. Bienvenue à eux dans la communauté de foi !

Comme Dieu, au temps de l’exil, a ouvert un chemin d’espérance pour ceux qui n’avaient plus d’avenir, il les appelle à rejoindre le chemin partagé par tous ceux qui s’engagent pour vivre cette énergie créatrice et la partager avec tous ceux qui en ont besoin. Bienvenue à eux sur le chemin de l’espérance !

Comme Dieu au temps de Jésus-Christ, a rejoint nos vies, a traversé la mort et a ouvert le temps de la vie nouvelle, semant par ses paroles et ses gestes les signes de l’amour de Dieu, il les appelle à vivre cet amour au fond d’eux-mêmes. Bienvenue à eux dans le règne de l’amour !

Le baptême d’Apolline et de Gabriel, c’est le signe de cela pour eux. C’est le rappel pour chacun de nous que cette histoire vivante est la nôtre, et que chaque jour nous sommes appelés à vivre et à partager. C’est l’appel pour nous à être témoins pour eux – et pour tous ceux qui dans ce monde l’ignorent encore – de la joie qu’il y a à croire, à espérer et à aimer.

Puissions-nous vivre ces dates, non pas seulement comme un souvenir, une histoire passée, une culture, mais comme l’aujourd’hui vivant de nos vies personnelles et de notre vie ensemble. Aujourd’hui.
Car si l’exode a eu lieu il y a plus de trente siècles, c’est aujourd’hui que Dieu nous libère. Si l’exil a eu lieu il y a 2600 ans, c’est aujourd’hui que Dieu nous donne un cœur nouveau. Car si Jésus est venu sur notre terre il y a près de 2000 ans, c’est aujourd’hui que Dieu nous dit qu’il aime.

 

C’est aujourd’hui que l’Evangile nous appelle, et c’est une joyeuse nouvelle… Puisse-t-elle faire date dans nos vies, aujourd’hui, demain, chaque jour !

 

Amen.